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Théâtre

"La Foire de Madrid", un classique du théâtre espagnol, une foire où l'on trouve de tout, même des amours contrariés

Auteur phare du Siècle d'Or espagnol, Lope de Vega est peu monté en France. Si l'on a pu voir "La Discrète amoureuse" ou "Le Chien du jardinier" montées ces dernières années, pour "La Foire de Madrid", c'est une première et la découverte de ce texte serti de comédie qui se termine en tragédie. Un style particulier que Lope de Vega a développé dans plusieurs de ses œuvres, un style dont s'est inspiré, à son époque, notre auteur de comédie national, Molière.



© Marc Gely.
© Marc Gely.
Le ton de la comédie domine la pièce. Une intrigue légère, amoureuse, qui se déroule dans la capitale espagnole, lors d'une grande foire qui semble se situer entre Exposition universelle et Carnaval. L'occasion pour les jeunes Madrilènes de courir les rues à la poursuite de robes et de jupons, pour une aventure, un amour véritable ou un mariage, à votre guise. Ce sont donc trois jeunes larrons qui sont les héros de cette tragi-comédie. L'un est fauché mais sincère, un autre riche et hâbleur, le troisième marié par intérêt à une femme plus âgée que lui et coureur.

Facéties de l'auteur, ce dernier se retrouvera piégé dans une piperie, obligé par les circonstances, il tente de séduire sa propre femme qu'il ne reconnaît pas, car elle est voilée. L'occasion de scènes de quiproquo qui sont devenues des classiques. Le second larron se voit dérober son or. Quant au premier, tout pauvre qu'il est, il rencontre les yeux de l'amour dans le visage d'une jeune femme. Hélas, celle-ci est mariée et toute l'histoire va se concentrer peu à peu sur cette intrigue amoureuse qui finira en drame.

© Marc Gely.
© Marc Gely.
Les huit interprètes développent un bel entrain pour faire briller leurs personnages dans un esprit classique et leurs jolis costumes dans le style de l'époque (costumes de Corinne Rossi) et les moments gracieux de l'excellent pianiste Olivier Mazal qui accompagne parfois le chant sensible de Laura Chetrit scandent le spectacle tout en lui procurant une sorte de respiration plus large qui ouvre les horizons de l'histoire au contexte qui l'entoure.

À noter le personnage de valet et d'écuyer, très drôle et original, que crée Hassan Tess. Le regret concerne les éclairages qui n'apportent rien et, au contraire, par leur atonie, desservent l'action ; et une occupation du grand plateau du Théâtre de pierre un peu trop réduite par le décor.

Reste que le spectacle nous donne avec bonheur, l'humeur et le ton ironique que le théâtre de Lope de Vega porte en lui.

"La Foire de Madrid"

© Marc Gely.
© Marc Gely.
Texte : Félix Lope de Vega.
Aide à la traduction : Agathe Peyraud et Stéphane Leroy.
Adaptation et mise en scène : Ronan Rivière.
Avec : Laura Chetrit, Michaël Giorno-Cohen, Ronan Rivière, Luc Rodier, Jérôme Rodriguez, Amélie Vignaux, Hassan Tess.
Piano : Olivier Mazal.
Scénographie : Antoine Milian
Costumes : Corinne Rossi
Lumière : Marc Augustin-Viguier
Musique au piano sur scène de Manuel de Falla.
Production Collectif Voix des Plumes.
Durée : 1 h 30.
À partir de 12 ans.

© Marc Gely.
© Marc Gely.
Du 8 au 25 septembre 2022.
Jeudi au samedi à 21 h, samedi et dimanche à 16 h 30.
Théâtre de l'Épée de Bois, Salle en pierre, Cartoucherie de Vincennes, Paris 12e, 01 48 08 39 74.
>> epeedebois.com

Tournée
14, 20 Janvier et 16 Février 2023 : 3 représentations dans les Yvelines, Théâtre Gérard Philipe de Saint-Cyr-L'École, Théâtre de La Celle-Saint-Cloud et Centre Culturel Jean Vilar à Marly-Le-Roi.

Bruno Fougniès
Mercredi 14 Septembre 2022

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"Le Chef-d'œuvre Inconnu" Histoire fascinante transcendée par le théâtre et le génie d'une comédienne

À Paris, près du quai des Grands-Augustins, au début du XVIIe siècle, trois peintres devisent sur leur art. L'un est un jeune inconnu promis à la gloire : Nicolas Poussin. Le deuxième, Franz Porbus, portraitiste du roi Henri IV, est dans la plénitude de son talent et au faîte de sa renommée. Le troisième, le vieux Maître Frenhofer, personnage imaginé par Balzac, a côtoyé les plus grands maîtres et assimilé leurs leçons. Il met la dernière main dans le plus grand secret à un mystérieux "chef-d'œuvre".

© Jean-François Delon.
Il faudra que Gilette, la compagne de Poussin, en qui Frenhofer espère trouver le modèle idéal, soit admise dans l'atelier du peintre, pour que Porbus et Poussin découvrent le tableau dont Frenhofer gardait jalousement le secret et sur lequel il travaille depuis 10 ans. Cette découverte les plongera dans la stupéfaction !

Quelle autre salle de spectacle aurait pu accueillir avec autant de justesse cette adaptation théâtrale de la célèbre nouvelle de Balzac ? Une petite salle grande comme un mouchoir de poche, chaleureuse et hospitalière malgré ses murs tout en pierres, bien connue des férus(es) de théâtre et nichée au cœur du Marais ?

Cela dit, personne ne nous avait dit qu'à l'Essaïon, on pouvait aussi assister à des séances de cinéma ! Car c'est pratiquement à cela que nous avons assisté lors de la générale de presse lundi 27 mars dernier tant le talent de Catherine Aymerie, la comédienne seule en scène, nous a emportés(es) et transportés(es) dans l'univers de Balzac. La force des images transmises par son jeu hors du commun nous a fait vire une heure d'une brillante intensité visuelle.

Pour peu que l'on foule de temps en temps les planches des théâtres en tant que comédiens(nes) amateurs(es), on saura doublement jauger à quel point jouer est un métier hors du commun !
C'est une grande leçon de théâtre que nous propose là la Compagnie de la Rencontre, et surtout Catherine Aymerie. Une très grande leçon !

Brigitte Corrigou
06/03/2024
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"L'Effet Papillon" Se laisser emporter au fil d'un simple vol de papillon pour une fascinante expérience

Vous pensez que vos choix sont libres ? Que vos pensées sont bien gardées dans votre esprit ? Que vous êtes éventuellement imprévisibles ? Et si ce n'était pas le cas ? Et si tout partait de vous… Ouvrez bien grands les yeux et vivez pleinement l'expérience de l'Effet Papillon !

© Pics.
Vous avez certainement entendu parler de "l'effet papillon", expression inventée par le mathématicien-météorologue Edward Lorenz, inventeur de la théorie du chaos, à partir d'un phénomène découvert en 1961. Ce phénomène insinue qu'il suffit de modifier de façon infime un paramètre dans un modèle météo pour que celui-ci s'amplifie progressivement et provoque, à long terme, des changements colossaux.

Par extension, l'expression sous-entend que les moindres petits événements peuvent déterminer des phénomènes qui paraissent imprévisibles et incontrôlables ou qu'une infime modification des conditions initiales peut engendrer rapidement des effets importants. Ainsi, les battements d'ailes d'un papillon au Brésil peuvent engendrer une tornade au Mexique ou au Texas !

C'est à partir de cette théorie que le mentaliste Taha Mansour nous invite à nouveau, en cette rentrée, à effectuer un voyage hors du commun. Son spectacle a reçu un succès notoire au Sham's Théâtre lors du Festival d'Avignon cet été dernier.

Impossible que quiconque sorte "indemne" de cette phénoménale prestation, ni que nos certitudes sur "le monde comme il va", et surtout sur nous-mêmes, ne soient bousculées, chamboulées, contrariées.

"Le mystérieux est le plus beau sentiment que l'on peut ressentir", Albert Einstein. Et si le plus beau spectacle de mentalisme du moment, en cette rentrée parisienne, c'était celui-là ? Car Tahar Mansour y est fascinant à plusieurs niveaux, lui qui voulait devenir ingénieur, pour qui "Centrale" n'a aucun secret, mais qui, pourtant, a toujours eu une âme d'artiste bien ancrée au fond de lui. Le secret de ce spectacle exceptionnel et époustouflant serait-il là, niché au cœur du rationnel et de la poésie ?

Brigitte Corrigou
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"Deux mains, la liberté" Un huis clos intense qui nous plonge aux sources du mal

Le mal s'appelle Heinrich Himmler, chef des SS et de la Gestapo, organisateur des camps de concentration du Troisième Reich, très proche d'Hitler depuis le tout début de l'ascension de ce dernier, près de vingt ans avant la Deuxième Guerre mondiale. Himmler ressemble par son physique et sa pensée à un petit, banal, médiocre fonctionnaire.

© Christel Billault.
Ordonné, pratique, méthodique, il organise l'extermination des marginaux et des Juifs comme un gestionnaire. Point. Il aurait été, comme son sous-fifre Adolf Eichmann, le type même décrit par Hannah Arendt comme étant la "banalité du mal". Mais Himmler échappa à son procès en se donnant la mort. Parfois, rien n'est plus monstrueux que la banalité, l'ordre, la médiocrité.

Malgré la pâleur de leur personnalité, les noms de ces âmes de fonctionnaires sont gravés dans notre mémoire collective comme l'incarnation du Mal et de l'inimaginable, quand d'autres noms - dont les actes furent éblouissants d'humanité - restent dans l'ombre. Parmi eux, Oskar Schindler et sa liste ont été sauvés de l'oubli grâce au film de Steven Spielberg, mais également par la distinction qui lui a été faite d'être reconnu "Juste parmi les nations". D'autres n'ont eu aucune de ces deux chances. Ainsi, le héros de cette pièce, Félix Kersten, oublié.

Joseph Kessel lui consacra pourtant un livre, "Les Mains du miracle", et, aujourd'hui, Antoine Nouel, l'auteur de la pièce, l'incarne dans la pièce qu'il a également mise en scène. C'est un investissement total que ce comédien a mis dans ce projet pour sortir des nimbes le visage étonnant de ce personnage de l'Histoire qui, par son action, a fait libérer près de 100 000 victimes du régime nazi. Des chiffres qui font tourner la tête, mais il est le résultat d'une volonté patiente qui, durant des années, négocia la vie contre le don.

Bruno Fougniès
15/10/2023