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Concerts

Les riches heures de la nouvelle Saison Musicale de Royaumont

Du 30 août au 12 octobre 2014, la Fondation Royaumont propose une quarantaine d’événements et une somptueuse affiche d’artistes pour fêter dignement son jubilé. Depuis 1936, la Saison Musicale fait revivre le superbe site de l’abbaye cistercienne dans le Parc naturel Oise-Pays de France. Et il y a du nouveau...



Réfectoire des moines, Abbaye de Royaumont © Agathe Poupeney.
Réfectoire des moines, Abbaye de Royaumont © Agathe Poupeney.
Après l’inauguration fin juin du Jardin-Potager dévolu aux concerts, installations sonores et autres performances chorégraphiques, un nouvel espace entièrement restauré vient d’ouvrir. Le Réfectoire des Convers situé au troisième côté du cloître offre désormais quatre cents places supplémentaires au grand Réfectoire que nous connaissons.

Qui a déjà assisté aux concerts organisés dans l’abbaye de Royaumont connaît cet incroyable sentiment de beauté qu’apportent non seulement la musique mais aussi les lieux. Et particulièrement ce moment de grâce où, arpentant l’allée qui traverse le parc sous le dôme immense du ciel nocturne, on découvre le monument. Rien que pour cela il faut s’y rendre à tout prix. Mais la Saison Musicale recèle bien d’autres atouts cette année encore. Et même davantage puisque des têtes d’affiche et autres talentueux artistes viennent en nombre commémorer le jubilé en question.

Cette fondation, qui avait reçu le soutien d’André Malraux dans sa démarche avant-gardiste (à l’époque) de valoriser un joyau du patrimoine en y organisant un événement culturel pérenne, a sans cesse enrichi son offre. Un Centre de la Voix en 1978 d’où sont sorties plusieurs générations de chanteurs lyriques - qui reviennent régulièrement nous enchanter sous les arcs cisterciens ou dans le parc. Le samedi d’ouverture de la saison s’est révélé tout bonnement ébouriffant avec trois récitals (ça c’est habituel) "d'étoiles" : le jeune ténor Cyrille Dubois, le baryton Stéphane Degout. Et le soir, le public a pu applaudir Nathalie Dessay, Karine Deshayes, Laurent Naouri et le ténor qui monte Edwin Crossley-Mercer.

Visite contée à Royaumont © DR.
Visite contée à Royaumont © DR.
En 1990 s’est ajoutée une Session annuelle de Composition dédiée à la musique contemporaine. Outre sa prédilection pour les répertoires médiéval, Renaissance et baroque, Royaumont s’est toujours identifié à un lieu d’avant-garde. Le 28 septembre pas moins de quinze créations sont programmées dans lesquelles brilleront le Quatuor Diotima, l’Ensemble Recherche et le Neue Vocalsolisten. D’autres sont prévues avec des œuvres de George Crumb, Malte Giesen entre nombreux autres - à d’autres dates. Les musiques du monde ne sont pas oubliées. Cette année nous sommes conviés à un Sommet Inde-Iran, à une rencontre avec la musique arabo-andalouse (avec Jésus Méndez), avec les musiques noires africaines et américaines (Ballaké Sissoko, le Black Earth Ensemble Chicago et Nicole Mitchell).

Parmi les nombreux invités de choix à écouter pendant les sept week-ends de la Saison Musicale, j’ai noté pour vous quelques rendez-vous à ne pas manquer. Vous avez raté le concert optique Satie/Cage conçu par Louise Moaty et performé par le pianiste Alexeï Lubimov ? Consolez-vous : des concerts de haut vol sont prévus jusqu’au 12 octobre : Francesco Tristano pour une création "Rameau, Reload", l’Ensemble Correspondances de Sébastien Daucé fidèle au lieu, l’Orchestre Les Siècles et son chef François-Xavier Roth avec l’alto Adrien La Marca (pour un excitant programme Berlioz). Et last but not least le contre-ténor Philippe Jarroussky accompagné du pianiste Jérôme Ducros et du Quatuor Ébène se produira dans un récital dédié aux mélodies françaises du XIXe siècle. Le même jour (le 11 octobre) viendront William Christie et ses Arts Florissants, comme Raphaël Pichon et son Ensemble Pygmalion. Enfin, tout au long de cet automne - qui s’annonce décidément très beau -, toujours de la danse, du théâtre, un mini opéra comique, des ateliers de pratique amateur, et bien d’autres choses encore.

Ensemble Pygmalion © Agathe Poupeney.
Ensemble Pygmalion © Agathe Poupeney.
Concerts et manifestations du 30 août au 12 octobre 2014.

Saison Musicale de Royaumont.
Abbaye de Royaumont, Asnières-sur-Oise (95).
Tél. : 01 34 68 05 50 (du mardi au vendredi de 10 h à 12 h et de 14 h à 18 h).
Royaumont est à 30 km au Nord de Paris.
>> royaumont.com


Navettes tous les week-ends en septembre et octobre de la gare de Viarmes (95).
Navettes (retour) de Royaumont pour Paris (Châtelet) tous les samedis soirs.
(Réservation obligatoire en ligne ou par téléphone).

Christine Ducq
Lundi 1 Septembre 2014

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Concerts | Lyrique







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"Lilou et Lino Le Voyage vers les étoiles" Petit à petit, les chats deviennent l'âme de la maison*

Qu'il est bon de se retrouver dans une salle de spectacle !
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Je ne pensais pas dire cela en pénétrant une salle bondée d'enfants, mais au bruit du dehors, très souvent infernal, j'ai vraiment apprécié l'instant et le brouhaha des petits, âgés, de 3 à 8 ans.

© Delphine Royer.
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Isabelle Lauriou
15/05/2025
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"Un Chapeau de paille d'Italie" Une version singulière et explosive interrogeant nos libertés individuelles face aux normalisations sociétales et idéologiques

Si l'art de générer des productions enthousiastes et inventives est incontestablement dans l'ADN de la compagnie L'Éternel Été, l'engagement citoyen fait aussi partie de la démarche créative de ses membres. La présente proposition ne déroge pas à la règle. Ainsi, Emmanuel Besnault et Benoît Gruel nous offrent une version décoiffante, vive, presque juvénile, mais diablement ancrée dans les problématiques actuelles, du "Chapeau de paille d'Italie"… pièce d'Eugène Labiche, véritable référence du vaudeville.

© Philippe Hanula.
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N'ayant pas vocation à pérenniser toute forme d'adaptation académique, nos deux metteurs en scène vont imaginer que cette histoire absurde est un songe, le songe d'une nuit… niché au creux du voyage ensommeillé de l'aimable Fadinard. Accrochez-vous à votre oreiller ! La pièce la plus célèbre de Labiche se transforme en une nouvelle comédie explosive, électro-onirique ! Comme un rêve habité de nounours dans un sommeil moelleux peuplé d'êtres extravagants en doudounes orange.

Gil Chauveau
11/03/2024
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"La vie secrète des vieux" Aimer même trop, même mal… Aimer jusqu'à la déchirure

"Telle est ma quête", ainsi parlait l'Homme de la Mancha de Jacques Brel au Théâtre des Champs-Élysées en 1968… Une quête qu'ont fait leur cette troupe de vieux messieurs et vieilles dames "indignes" (cf. "La vieille dame indigne" de René Allio, 1965, véritable ode à la liberté) avides de vivre "jusqu'au bout" (ouaf… la crudité revendiquée de leur langue émancipée y autorise) ce qui constitue, n'en déplaise aux catholiques conservateurs, le sel de l'existence. Autour de leur metteur en scène, Mohamed El Khatib, ils vont bousculer les règles de la bienséance apprise pour dire sereinement l'amour chevillé au corps des vieux.

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Votre ticket n'est plus valable. Prenez vos pilules, jouez au Monopoly, au Scrabble, regardez la télé… des jeux de votre âge quoi ! Et surtout, ayez la dignité d'attendre la mort en silence, on ne veut pas entendre vos jérémiades et – encore moins ! – vos chuchotements de plaisir et vos cris d'amour… Mohamed El Khatib, fin observateur des us et coutumes de nos sociétés occidentales, a documenté son projet théâtral par une série d'entretiens pris sur le vif en Ehpad au moment de la Covid, des mouroirs avec eau et électricité à tous les étages. Autour de lui et d'une aide-soignante, artiste professionnelle pétillante de malice, vont exister pleinement huit vieux et vieilles revendiquant avec une belle tranquillité leur droit au sexe et à l'amour (ce sont, aussi, des sentimentaux, pas que des addicts de la baise).

Un fauteuil roulant poussé par un vieux très guilleret fait son entrée… On nous avertit alors qu'en fonction du grand âge des participant(e)s au plateau, et malgré les deux défibrillateurs à disposition, certain(e)s sont susceptibles de mourir sur scène, ce qui – on l'admettra aisément – est un meilleur destin que mourir en Ehpad… Humour noir et vieilles dentelles, le ton est donné. De son fauteuil, la doyenne de la troupe, 91 ans, Belge et ancienne présentatrice du journal TV, va ar-ti-cu-ler son texte, elle qui a renoncé à son abonnement à la Comédie-Française car "ils" ne savent plus scander, un vrai scandale ! Confiant plus sérieusement que, ce qui lui manque aujourd'hui – elle qui a eu la chance d'avoir beaucoup d'hommes –, c'est d'embrasser quelqu'un sur la bouche et de manquer à quelqu'un.

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