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Paroles & Musique

Gais, frais, colorés et épicés... ce sont les Piments Givrés !

"Le Tour du Monde en 33 Tours", Théâtre Les Déchargeurs, Paris

[Reprise] Piment vert, piment rouge ou piment jaune, peu importe la couleur avec les Piments Givrés. Leur voyage autour du Monde est à servir glacé comme une énorme boule de glace tutti frutti posée... sur un cornet acoustique pour mieux entendre les musiques du monde ! Et c'est une aubaine en plein été... Surtout sous les chaleurs festivalières d'Avignon.



Jef De La Cruz © Patrick Margueritat 2010.
Jef De La Cruz © Patrick Margueritat 2010.
Ambiance bigarrée, musique rythmée et humour déjanté... tel est le cocktail que concocte depuis leur création, il y a un an et demi, les Piments Givrés. Mélangeant avec talent les arts de la comédie, du mime, de la danse, du clown et de la musique, ils construisent, à l'aide de chansons originales (remarquablement bien joués, étant tous excellents instrumentistes), un univers à double fond... plus précisément à double niveau de lecture, tant au niveau des références que des jeux de mots, permettant d'emmener dans leur "Tour du Monde en 33 Tours" aussi bien les enfants (à partir de 6 ans) que les parents.

Dés l'entrée en scène de nos saltimbanques givrés - gaiement atteint d'une joyeuse folie communicatrice -, on comprend qu'ils ont fait de l'adage "les voyages forment la jeunesse" leur credo, en y ajoutant... "les voyages apprennent aussi la tolérance" !
Les aventures de nos globe-trotteurs "couleur BD" débute à Paris par une rencontre avec un pavé déprimé qui ne voyage sans doute plus depuis un certain mois de mai (en l’occurrence, à cette époque-là, il avait plutôt tendance à voler !) et, si ce n'était son poids, se serait bien logé dans les bagages de nos gai-lurons zinzinés.

Monya Rekik © Patrick Margueritat 2010.
Monya Rekik © Patrick Margueritat 2010.
Mais déjà le premier vol destination "Pays de l'autre" est annoncé. Direction la Roumanie et un petit plongeon dans l'actualité à la rencontre d'un gitan que la vindicte populaire nomme "voleur de poules". Sur un air jazzy-manouche en frises "accordéonesques", nos hurluberlus explorateurs de cultures disent alors l'absurdité des clichés sur "l'homme qui vit dans une maison qui roule"... Sitôt fait la connaissance du voyageur manouche, voici nos cinq Piments partis pour le Moyen-Orient, volant sur une musique au phrasé cousu de fines arabesques. La chanson "Dour Biha" aborde, façon Roméo et Juliette (ici Rachel et Ali), le problème Israélo-Palestinien de façon subtile et imagée, et poétisé par les entrechats légers et gracieux de Monya Rekik.

Il est déjà temps de remonter dans l'avion - dont les hublots sont représentés, non sans humour, par des lunettes de WC - en partance pour l'Inde, plus précisément Calcutta. "Tereketaco Da" est l'histoire d'un chauffeur de taxi en triporteur motorisé, virtuose du klaxon, zigzaguant dans les rues bondées au milieu des vaches sacrées et des voitures affolées. Une fois abordés les crues du fleuve Hûghlî et le Karma bengali, on saute dans le prochain vol pour le carnaval de Mexico dans la favela du Barrio Rojo où le petit Pepito joue au chat et à la souris avec le "Sargento Garcia"... Une petite référence au passage au Che Comandante qui sera "la panoplie, l'arsenal que Pépito va endosser".

Les Piments Givrés © Patrick Margueritat 2010.
Les Piments Givrés © Patrick Margueritat 2010.
Le Carnet de voyages se poursuit avec la rencontre du "Chat Rastafari" de Jamaïque, donnant l'occasion, sur une rythmique reggae, d'approcher les tics (l'éthique) rastas du minou qui fuma jadis avec le grand Bob ! En toute logique, le trajet suivant nous emmène en Abyssinie, sous les cieux africains, suivre l'initiation de Gorkine voulant devenir un brave guerrier. Nouvelle culture, nouvelles traditions... Ici toujours la même préoccupation : s'ouvrir à l'autre, être curieux de celui qui est différent.
Un petit tour aux États-Unis, du Nevada au Mississippi, comme un hommage à la musique américaine – et à la guitare -, nous fait passer du country au blues, en passant par le jazz new-yorkais ou le phrasé scandé des rappeurs de Los Angeles.

Sans jamais tomber dans les travers du folklore facile, nos joyeux drilles cisèlent tant les mélodies que les rythmes adaptés à chaque pays. Joyeux et loufoques mais jamais niais, sur des airs endiablés ou plus doux mais jamais conçus comme des ritournelles faciles. Et surtout toujours créatifs. La particularité et la force – leur indéniable talent – des Piments Givrés est leur sens du spectacle. Les textes de Jef De La Cruz, souvent fleuris, où teintent alternativement, comme de fines cloches tibétaines, le rire et l'émotion, sont empreints d'une grande générosité, résultat d'une écriture maîtrisée. Monya Rekik, François Tousch, Thierry Paul et Yoann Godefroy, pétillants larrons pimentés, farfadets malicieux, assemblent avec justesse leurs différents talent (multi-instrumentistes pour les garçons et mime danse pour Monya) à ceux de Jef pour composer une comédie musicale déjantée mais harmonieuse où le mot Fin s'écrit dans toutes les langues sur l'horizon de la culture plurielle.

La compagnie des Piments Givrés est l'une des 10 compagnies lauréates du fonds de soutien Avignon Festival & Compagnies 2011.

"Le Tour du Monde en 33 Tours"

Les Piments Givrés © MaNa.
Les Piments Givrés © MaNa.
(Vu le 9 juillet 2011)
Par les Les Piments Givrés.
Textes : Jef De La Cruz.
Mise en scène : Pierre Pirol.
Interprètes : Jean-François De La Cruz (auteur, compositeur, chant, guitare), Monya Rekik (danse, mime), Thierry Paul (compositeur, guitare), Yoann Godefroy (contrebasse, basse), François Tousch (accordéon, bandonéon).
Durée : 1 h 10.

Spectacle du 17 octobre au 12 décembre 2012.
Mercredi et samedi à 16 h 30 (relâches les 14 et 24 novembre).
Théâtre Les Déchargeurs, Salle Vicky Messica , Paris 1er, 08 92 70 12 28.
>> lesdechargeurs.fr

Du 8 au 30 juillet 2011.
Tous les jours à 10 h 30 (durée 1 h).
Théâtre de l’Étincelle, 14, place des Études, Avignon, 04 90 85 43 91
30 juillet 2011, 21 h à Montluçon (03).

Spectacle du 25 octobre au 4 novembre 2011.
Mardi au vendredi à 14 h.
Théâtre de Menilmontant,15 rue du Retrait, Paris 20e.
01 46 36 98 60. www.menilmontant.info

Gil Chauveau
Vendredi 15 Juillet 2011

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À découvrir

"Le Chef-d'œuvre Inconnu" Histoire fascinante transcendée par le théâtre et le génie d'une comédienne

À Paris, près du quai des Grands-Augustins, au début du XVIIe siècle, trois peintres devisent sur leur art. L'un est un jeune inconnu promis à la gloire : Nicolas Poussin. Le deuxième, Franz Porbus, portraitiste du roi Henri IV, est dans la plénitude de son talent et au faîte de sa renommée. Le troisième, le vieux Maître Frenhofer, personnage imaginé par Balzac, a côtoyé les plus grands maîtres et assimilé leurs leçons. Il met la dernière main dans le plus grand secret à un mystérieux "chef-d'œuvre".

© Jean-François Delon.
Il faudra que Gilette, la compagne de Poussin, en qui Frenhofer espère trouver le modèle idéal, soit admise dans l'atelier du peintre, pour que Porbus et Poussin découvrent le tableau dont Frenhofer gardait jalousement le secret et sur lequel il travaille depuis 10 ans. Cette découverte les plongera dans la stupéfaction !

Quelle autre salle de spectacle aurait pu accueillir avec autant de justesse cette adaptation théâtrale de la célèbre nouvelle de Balzac ? Une petite salle grande comme un mouchoir de poche, chaleureuse et hospitalière malgré ses murs tout en pierres, bien connue des férus(es) de théâtre et nichée au cœur du Marais ?

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Pour peu que l'on foule de temps en temps les planches des théâtres en tant que comédiens(nes) amateurs(es), on saura doublement jauger à quel point jouer est un métier hors du commun !
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"L'Effet Papillon" Se laisser emporter au fil d'un simple vol de papillon pour une fascinante expérience

Vous pensez que vos choix sont libres ? Que vos pensées sont bien gardées dans votre esprit ? Que vous êtes éventuellement imprévisibles ? Et si ce n'était pas le cas ? Et si tout partait de vous… Ouvrez bien grands les yeux et vivez pleinement l'expérience de l'Effet Papillon !

© Pics.
Vous avez certainement entendu parler de "l'effet papillon", expression inventée par le mathématicien-météorologue Edward Lorenz, inventeur de la théorie du chaos, à partir d'un phénomène découvert en 1961. Ce phénomène insinue qu'il suffit de modifier de façon infime un paramètre dans un modèle météo pour que celui-ci s'amplifie progressivement et provoque, à long terme, des changements colossaux.

Par extension, l'expression sous-entend que les moindres petits événements peuvent déterminer des phénomènes qui paraissent imprévisibles et incontrôlables ou qu'une infime modification des conditions initiales peut engendrer rapidement des effets importants. Ainsi, les battements d'ailes d'un papillon au Brésil peuvent engendrer une tornade au Mexique ou au Texas !

C'est à partir de cette théorie que le mentaliste Taha Mansour nous invite à nouveau, en cette rentrée, à effectuer un voyage hors du commun. Son spectacle a reçu un succès notoire au Sham's Théâtre lors du Festival d'Avignon cet été dernier.

Impossible que quiconque sorte "indemne" de cette phénoménale prestation, ni que nos certitudes sur "le monde comme il va", et surtout sur nous-mêmes, ne soient bousculées, chamboulées, contrariées.

"Le mystérieux est le plus beau sentiment que l'on peut ressentir", Albert Einstein. Et si le plus beau spectacle de mentalisme du moment, en cette rentrée parisienne, c'était celui-là ? Car Tahar Mansour y est fascinant à plusieurs niveaux, lui qui voulait devenir ingénieur, pour qui "Centrale" n'a aucun secret, mais qui, pourtant, a toujours eu une âme d'artiste bien ancrée au fond de lui. Le secret de ce spectacle exceptionnel et époustouflant serait-il là, niché au cœur du rationnel et de la poésie ?

Brigitte Corrigou
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Le mal s'appelle Heinrich Himmler, chef des SS et de la Gestapo, organisateur des camps de concentration du Troisième Reich, très proche d'Hitler depuis le tout début de l'ascension de ce dernier, près de vingt ans avant la Deuxième Guerre mondiale. Himmler ressemble par son physique et sa pensée à un petit, banal, médiocre fonctionnaire.

© Christel Billault.
Ordonné, pratique, méthodique, il organise l'extermination des marginaux et des Juifs comme un gestionnaire. Point. Il aurait été, comme son sous-fifre Adolf Eichmann, le type même décrit par Hannah Arendt comme étant la "banalité du mal". Mais Himmler échappa à son procès en se donnant la mort. Parfois, rien n'est plus monstrueux que la banalité, l'ordre, la médiocrité.

Malgré la pâleur de leur personnalité, les noms de ces âmes de fonctionnaires sont gravés dans notre mémoire collective comme l'incarnation du Mal et de l'inimaginable, quand d'autres noms - dont les actes furent éblouissants d'humanité - restent dans l'ombre. Parmi eux, Oskar Schindler et sa liste ont été sauvés de l'oubli grâce au film de Steven Spielberg, mais également par la distinction qui lui a été faite d'être reconnu "Juste parmi les nations". D'autres n'ont eu aucune de ces deux chances. Ainsi, le héros de cette pièce, Félix Kersten, oublié.

Joseph Kessel lui consacra pourtant un livre, "Les Mains du miracle", et, aujourd'hui, Antoine Nouel, l'auteur de la pièce, l'incarne dans la pièce qu'il a également mise en scène. C'est un investissement total que ce comédien a mis dans ce projet pour sortir des nimbes le visage étonnant de ce personnage de l'Histoire qui, par son action, a fait libérer près de 100 000 victimes du régime nazi. Des chiffres qui font tourner la tête, mais il est le résultat d'une volonté patiente qui, durant des années, négocia la vie contre le don.

Bruno Fougniès
15/10/2023