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"Le Petit Poucet" vu par Laurent Gutmann : une critique douce sur le "bonheur" familial

"Le Petit Poucet", Théâtre Paris-Villette, Paris

Ses parents ne le voient pas grandir celui qu'ils appellent leur "petit poucet" : tout en se montrant très inquiets face aux charges qu'il représente. Ils sont un peu (beaucoup !) infantiles, mangent des pizzas, parlent beaucoup, pépient même, rêvent de basket et de footing en forêt. Ils sont contemporains.



© Pierre Grosbois.
© Pierre Grosbois.
Silencieux, le petit poucet ne parle pas (c'est un enfant), observe, comprend qu'ils veulent se séparer de lui. Abandonné en forêt, après avoir rencontré la peur et triomphé d'un mangeur d'enfants à l'allure d'une publicité pour le bonheur de vivre, il revient malgré tout, en dépit de tout, apportant à ses parents sa part de richesses bien sonnantes et trébuchantes. C'est qu'un lien mystérieux, un besoin de chaleur et de présence est étrangement fort : le nid familier où cohabitent les générations et auquel chacun travaille.

En confiant le rôle à Jean-Luc Orofino, comédien de très petite taille, Laurent Gutmann donne au personnage serré dans son costume gris comme une lecture rétrospective du rôle qu'il joue au sein de la famille. Celui d'un homme vieillissant attendri sur le souvenir de ses parents, ce qui renforce l'intuition du spectateur que le petit poucet fait partie de ces enfants adultes depuis fort longtemps. Qui prennent en charge leurs parents immatures.

Cette adaptation du conte de Charles Perrault, avec cette distribution des rôles digne d'une télé réalité, décrit la famille à enfant unique du monde moderne. Cette approche ravive une forme de critique douce sur le bonheur familial.

Ce théâtre avec son réalisme poétique et merveilleux rend sensible la fonction d'apaisement et d'initiation à la vie que joue tout conte. La leçon de cette histoire est que l'essentiel est de bien s'entendre et de rire sans craindre la gravité du monde. En témoignent les applaudissements nourris que cette proposition reçoit de la part du spectateur et sa famille réunie.

"Le Petit Poucet ou du bienfait des balades en forêt dans l'éducation des enfants"

© Pierre Grosbois.
© Pierre Grosbois.
D'après Charles Perrault.
Spectacle tout public dès 9 ans.
Écriture et mise en scène : Laurent Gutmann.
Avec : Jade Collinet, David Gouhier, Jean-Luc Orofino.
Scénographie : Mathieu Lorry-Dupuy, Laurent Gutmann.
Lumières : Gilles Gentner.
Son : Madame Miniature.
Costumes : Axel Aust.
Maquillages, perruques : Catherine Saint-Sever.
Prix Momix 2013.
Durée : 1 h.

Du 11 au 25 octobre 2014.
Samedi 11, vendredi 17 et 24 à 19 h, dimanche 12 et 19, samedi 25 à 16 h, mercredi 15, mardi 21, mercredi 22 et jeudi 23 à 14 h 30.
Théâtre Paris-Villette, Grande Salle, Paris 19e, 01 40 03 72 23.
>> theatre-paris-villette.fr

Tournée 2014
6 et 7 novembre 2014 : Le Bois de l'Aune, Pôle artistique et culturel du Pays d'Aix, Aix-en-Provence (13).
13, 14 et 20, 21 novembre 2014 : Le Grand T, Théâtre de Loire-Atlantique dans le cadre des projets de territoire, Nantes (44).
25 au 28 novembre 2014 : La Coursive, scène nationale, La Rochelle (17).
1er, 2 décembre et 11, 12 décembre 2014 : Le Grand T, Théâtre de Loire-Atlantique dans le cadre des projets de territoire, Nantes (44).
16 décembre 2014 : Théâtre du Cormier, Cormeilles-en-Parisis (95).
18 et 19 décembre 2014 : Les Scènes du Jura, Scène nationale, Dole (39).

Jean Grapin
Mercredi 22 Octobre 2014

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"Le Chef-d'œuvre Inconnu" Histoire fascinante transcendée par le théâtre et le génie d'une comédienne

À Paris, près du quai des Grands-Augustins, au début du XVIIe siècle, trois peintres devisent sur leur art. L'un est un jeune inconnu promis à la gloire : Nicolas Poussin. Le deuxième, Franz Porbus, portraitiste du roi Henri IV, est dans la plénitude de son talent et au faîte de sa renommée. Le troisième, le vieux Maître Frenhofer, personnage imaginé par Balzac, a côtoyé les plus grands maîtres et assimilé leurs leçons. Il met la dernière main dans le plus grand secret à un mystérieux "chef-d'œuvre".

© Jean-François Delon.
Il faudra que Gilette, la compagne de Poussin, en qui Frenhofer espère trouver le modèle idéal, soit admise dans l'atelier du peintre, pour que Porbus et Poussin découvrent le tableau dont Frenhofer gardait jalousement le secret et sur lequel il travaille depuis 10 ans. Cette découverte les plongera dans la stupéfaction !

Quelle autre salle de spectacle aurait pu accueillir avec autant de justesse cette adaptation théâtrale de la célèbre nouvelle de Balzac ? Une petite salle grande comme un mouchoir de poche, chaleureuse et hospitalière malgré ses murs tout en pierres, bien connue des férus(es) de théâtre et nichée au cœur du Marais ?

Cela dit, personne ne nous avait dit qu'à l'Essaïon, on pouvait aussi assister à des séances de cinéma ! Car c'est pratiquement à cela que nous avons assisté lors de la générale de presse lundi 27 mars dernier tant le talent de Catherine Aymerie, la comédienne seule en scène, nous a emportés(es) et transportés(es) dans l'univers de Balzac. La force des images transmises par son jeu hors du commun nous a fait vire une heure d'une brillante intensité visuelle.

Pour peu que l'on foule de temps en temps les planches des théâtres en tant que comédiens(nes) amateurs(es), on saura doublement jauger à quel point jouer est un métier hors du commun !
C'est une grande leçon de théâtre que nous propose là la Compagnie de la Rencontre, et surtout Catherine Aymerie. Une très grande leçon !

Brigitte Corrigou
06/03/2024
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Vous pensez que vos choix sont libres ? Que vos pensées sont bien gardées dans votre esprit ? Que vous êtes éventuellement imprévisibles ? Et si ce n'était pas le cas ? Et si tout partait de vous… Ouvrez bien grands les yeux et vivez pleinement l'expérience de l'Effet Papillon !

© Pics.
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C'est à partir de cette théorie que le mentaliste Taha Mansour nous invite à nouveau, en cette rentrée, à effectuer un voyage hors du commun. Son spectacle a reçu un succès notoire au Sham's Théâtre lors du Festival d'Avignon cet été dernier.

Impossible que quiconque sorte "indemne" de cette phénoménale prestation, ni que nos certitudes sur "le monde comme il va", et surtout sur nous-mêmes, ne soient bousculées, chamboulées, contrariées.

"Le mystérieux est le plus beau sentiment que l'on peut ressentir", Albert Einstein. Et si le plus beau spectacle de mentalisme du moment, en cette rentrée parisienne, c'était celui-là ? Car Tahar Mansour y est fascinant à plusieurs niveaux, lui qui voulait devenir ingénieur, pour qui "Centrale" n'a aucun secret, mais qui, pourtant, a toujours eu une âme d'artiste bien ancrée au fond de lui. Le secret de ce spectacle exceptionnel et époustouflant serait-il là, niché au cœur du rationnel et de la poésie ?

Brigitte Corrigou
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© Christel Billault.
Ordonné, pratique, méthodique, il organise l'extermination des marginaux et des Juifs comme un gestionnaire. Point. Il aurait été, comme son sous-fifre Adolf Eichmann, le type même décrit par Hannah Arendt comme étant la "banalité du mal". Mais Himmler échappa à son procès en se donnant la mort. Parfois, rien n'est plus monstrueux que la banalité, l'ordre, la médiocrité.

Malgré la pâleur de leur personnalité, les noms de ces âmes de fonctionnaires sont gravés dans notre mémoire collective comme l'incarnation du Mal et de l'inimaginable, quand d'autres noms - dont les actes furent éblouissants d'humanité - restent dans l'ombre. Parmi eux, Oskar Schindler et sa liste ont été sauvés de l'oubli grâce au film de Steven Spielberg, mais également par la distinction qui lui a été faite d'être reconnu "Juste parmi les nations". D'autres n'ont eu aucune de ces deux chances. Ainsi, le héros de cette pièce, Félix Kersten, oublié.

Joseph Kessel lui consacra pourtant un livre, "Les Mains du miracle", et, aujourd'hui, Antoine Nouel, l'auteur de la pièce, l'incarne dans la pièce qu'il a également mise en scène. C'est un investissement total que ce comédien a mis dans ce projet pour sortir des nimbes le visage étonnant de ce personnage de l'Histoire qui, par son action, a fait libérer près de 100 000 victimes du régime nazi. Des chiffres qui font tourner la tête, mais il est le résultat d'une volonté patiente qui, durant des années, négocia la vie contre le don.

Bruno Fougniès
15/10/2023