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Cirque & Rue

Succès mérité pour CIRCa, le cirque dans tous ses états !

Premier week-end à chapiteaux pleins à Auch sous le soleil occitan pour la 34e édition du festival du cirque actuel. Dans une ambiance éminemment festive, le public avait investi les différents espaces du festival, tant le Dôme de Gascogne et la salle Bernard Turin que les toiles édifiées à proximité ou sur d'autres lieux de la commune gersoise, pour découvrir des propositions artistiques riches et variées, d'une grande diversité de formes et de styles.



"Les hauts plateaux" par Mathurin Bolze et la Cie MPTA © Christophe Raynaud De Lage.
"Les hauts plateaux" par Mathurin Bolze et la Cie MPTA © Christophe Raynaud De Lage.
On pouvait ainsi apprécier, lors de ces deux premières journées, l'espiègle énergie et la bonne humeur des jeunes acrobates australiens de la Cie Gravity and Others Myths, "PANDAX", le cirque narratif de Cirque La Compagnie, la Cie H.M.G. avec son onirique et carrément magique "080" ou encore "Les hauts plateaux", la création 2019 de Mathurin Bolze/Cie MPTA (Compagnie les Mains les Pieds et la Tête Aussi).

Proposition forte au programme de ce week-end introductif, "Les hauts plateaux" offraient une scénographie originale, mystérieuse et très technique faite de trampolines, de plateaux volants et d'agrès en suspension. Dans une vision aux couleurs d'apocalypse, sur fonds de ruines passées, présentes ou imaginaires, ces hauts plateaux se dessinent comme autant d'îles défiant les lois de la gravité… où des êtres, silhouettes parfois irréelles, artistes de l'aérien, de la légèreté, embrassent d'éphémères, mais sans cesse renouvelés, moments acrobatiques, entre deux équilibres, portés, guidés par les rebonds d'efficaces trampolines.

"Les hauts plateaux" © Christophe Raynaud De Lage.
"Les hauts plateaux" © Christophe Raynaud De Lage.
Au commencement, comme une impression sonore de petites cloches tibétaines, cristallines, tintant au lointain, comme un souffle caressant quelques sculptures en bois flotté, bras élancés sans corps, souvenirs anciens d'arbres. Puis la dynamique circassienne s'éveille en d'incroyables acrobaties impulsées par les deux trampolines, chacune, chacun se jouant en échanges subtils, en glissements à répétition, tout en souplesse féline, tout en virtuosité maîtrisée, puis passant d'un ballant à une immense échelle en cheminement "recto-verso" et en mode haute voltige.

Décor mobile, mutant, tout se modifie, empreint d'une "presque" vivacité animale, offrant de nouvelles perspectives, de nouveaux terrains de jeux, d'exploration, comme un monde fini qui finirait par renaître dans des expressions vertigineuses. De cette possible renaissance jaillissent des flashs humoristiques ou des espérances plus sensuelles, voire carrément sexuelles, mais dans une simplicité présageant une nouvelle vie.

Les sept membres de la compagnie MPTA excellent dans leur pratique acrobatique, tous leurs mouvements expriment vélocité et agilité. Certains d'entre eux sont dupliqués à l'envi, presque trop parfois, générant quelques petites longueurs. Mais l'ensemble est inventif et magique. L'art de la renaissance en se jouant de la gravité… Réalisé par une troupe de circassiens virtuoses, sautillants et légers comme l'air… comme une poétique réflexion sur une possible réinvention de notre monde pour demain.

Spectacle vu le vendredi 22 octobre 2021 dans le cadre du Festival du cirque actuel à Auch.

"Les hauts plateaux"

"Les hauts plateaux" © Christophe Raynaud De Lage.
"Les hauts plateaux" © Christophe Raynaud De Lage.
Conception : Mathurin Bolze.
De et avec : Anahi De Las Cuevas, Julie Tavert, Johan Caussin, Frédéri Vernier, Corentin Diana, Andres Labarca, Mathurin Bolze.
Dramaturgie : Samuel Vittoz.
Scénographie : Goury.
Machinerie scénique et régie plateau : Nicolas Julliand.
Composition musicale : Camel Zekri.
Création sonore et direction technique : Jérôme Fèvre.
Création lumière : Rodolphe Martin.
Création vidéo : Wilfrid Haberey.
Création costumes : Fabrice Ilia Leroy.
Construction décor par les ateliers de la MC93 Bobigny.
Régie lumière : Florent Jadaud.
Régie son : Lola Etiève.
Dès 10 ans.
Durée : 1 h 15.

Tournée

"Les hauts plateaux", photo de répétition © Christophe Raynaud De Lage.
"Les hauts plateaux", photo de répétition © Christophe Raynaud De Lage.
28 et 29 octobre 2021 : Théâtre Le Vellein, Scènes de la CAPI, Villefontaine (38).
5 novembre 2021 : Espaces pluriels - scène conventionnée, Pau (64).
13 et 14 novembre 2021 : La Verrerie avec Le Cratère - scène nationale, Alès (30).
13, 14, 15, 16, 18 et 19 décembre : Théâtre de la Cité - CDN, Toulouse (31).
6 et 7 janvier 2022 : Le Moulin du Roc - scène nationale Niort (79).
Du 3 au 5 février 2022 : L'Empreinte - Théâtre de Brive, Brive (19).
Du 9 au 11 février 2022 : Théâtre d'Angoulême (16).
11, 12 et 13 mars 2022 : Equilibre – Nuithonie, Villars-sur-Glâne (Suisse).
16 et 17 mars 2022 : Maison de la Culture, Bourges (18).
01 et 02 avril 2022 : Théâtre Central, Séville (Espagne).
21 et 22 avril 2022 : Théâtre de Saint-Quentin-en-Yvelines (78).
27 et 28 avril 2022 : Le Grand R, La Roche sur Yon (85).
14 et 15 juin 2022 : Les Quinconces et L'Espal - scène nationale, Le Mans (72).

CIRCa

34e Festival du cirque actuel
Du 21 au 30 octobre 2021
Allée des Arts, Auch (32), 05 62 61 65 00.
>> circa.auch.fr
>> Billetterie en ligne

Le festival en quelques chiffres : 10 jours de festival avec 23 spectacles professionnels, 12 spectacles d'école de cirque (CNAC, Ésacto'Lido, Fédération Française des Écoles de Cirque, Fédération Européenne des Écoles de Cirque), 91 représentations réparties sur 15 lieux.

© CIRCa.
© CIRCa.

Gil Chauveau
Mardi 26 Octobre 2021

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À découvrir

"L'Effet Papillon" Se laisser emporter au fil d'un simple vol de papillon pour une fascinante expérience

Vous pensez que vos choix sont libres ? Que vos pensées sont bien gardées dans votre esprit ? Que vous êtes éventuellement imprévisibles ? Et si ce n'était pas le cas ? Et si tout partait de vous… Ouvrez bien grands les yeux et vivez pleinement l'expérience de l'Effet Papillon !

© Pics.
Vous avez certainement entendu parler de "l'effet papillon", expression inventée par le mathématicien-météorologue Edward Lorenz, inventeur de la théorie du chaos, à partir d'un phénomène découvert en 1961. Ce phénomène insinue qu'il suffit de modifier de façon infime un paramètre dans un modèle météo pour que celui-ci s'amplifie progressivement et provoque, à long terme, des changements colossaux.

Par extension, l'expression sous-entend que les moindres petits événements peuvent déterminer des phénomènes qui paraissent imprévisibles et incontrôlables ou qu'une infime modification des conditions initiales peut engendrer rapidement des effets importants. Ainsi, les battements d'ailes d'un papillon au Brésil peuvent engendrer une tornade au Mexique ou au Texas !

C'est à partir de cette théorie que le mentaliste Taha Mansour nous invite à nouveau, en cette rentrée, à effectuer un voyage hors du commun. Son spectacle a reçu un succès notoire au Sham's Théâtre lors du Festival d'Avignon cet été dernier.

Impossible que quiconque sorte "indemne" de cette phénoménale prestation, ni que nos certitudes sur "le monde comme il va", et surtout sur nous-mêmes, ne soient bousculées, chamboulées, contrariées.

"Le mystérieux est le plus beau sentiment que l'on peut ressentir", Albert Einstein. Et si le plus beau spectacle de mentalisme du moment, en cette rentrée parisienne, c'était celui-là ? Car Tahar Mansour y est fascinant à plusieurs niveaux, lui qui voulait devenir ingénieur, pour qui "Centrale" n'a aucun secret, mais qui, pourtant, a toujours eu une âme d'artiste bien ancrée au fond de lui. Le secret de ce spectacle exceptionnel et époustouflant serait-il là, niché au cœur du rationnel et de la poésie ?

Brigitte Corrigou
08/09/2023
Spectacle à la Une

"Hedwig and the Angry inch" Quand l'ingratitude de la vie œuvre en silence et brise les rêves et le talent pourtant si légitimes

La comédie musicale rock de Broadway enfin en France ! Récompensée quatre fois aux Tony Awards, Hedwig, la chanteuse transsexuelle germano-américaine, est-allemande, dont la carrière n'a jamais démarré, est accompagnée de son mari croate,Yithak, qui est aussi son assistant et choriste, mais avec lequel elle entretient des relations malsaines, et de son groupe, the Angry Inch. Tout cela pour retracer son parcours de vie pour le moins chaotique : Berlin Est, son adolescence de mauvais garçon, son besoin de liberté, sa passion pour le rock, sa transformation en Hedwig après une opération bâclée qui lui permet de quitter l'Allemagne en épouse d'un GI américain, ce, grâce au soutien sans failles de sa mère…

© Grégory Juppin.
Hedwig bouscule les codes de la bienséance et va jusqu'au bout de ses rêves.
Ni femme, ni homme, entre humour queer et confidences trash, il/elle raconte surtout l'histoire de son premier amour devenu l'une des plus grandes stars du rock, Tommy Gnosis, qui ne cessera de le/la hanter et de le/la poursuivre à sa manière.

"Hedwig and the Angry inch" a vu le jour pour la première fois en 1998, au Off Broadway, dans les caves, sous la direction de John Cameron Mitchell. C'est d'ailleurs lui-même qui l'adaptera au cinéma en 2001. C'est la version de 2014, avec Neil Patrick Harris dans le rôle-titre, qui remporte les quatre Tony Awards, dont celui de la meilleure reprise de comédie musicale.

Ce soir-là, c'était la première fois que nous assistions à un spectacle au Théâtre du Rouge Gorge, alors que nous venons pourtant au Festival depuis de nombreuses années ! Situé au pied du Palais des Papes, du centre historique et du non moins connu hôtel de la Mirande, il s'agit là d'un lieu de la ville close pour le moins pittoresque et exceptionnel.

Brigitte Corrigou
20/09/2023
Spectacle à la Une

"Zoo Story" Dans un océan d'inhumanités, retrouver le vivre ensemble

Central Park, à l'heure de la pause déjeuner. Un homme seul profite de sa quotidienne séquence de répit, sur un banc, symbole de ce minuscule territoire devenu son havre de paix. Dans ce moment voulu comme une trêve face à la folie du monde et aux contraintes de la société laborieuse, un homme surgit sans raison apparente, venant briser la solitude du travailleur au repos. Entrant dans la narration d'un pseudo-récit, il va bouleverser l'ordre des choses, inverser les pouvoirs et détruire les convictions, pour le simple jeu – absurde ? – de la mise en exergue de nos inhumanités et de nos dérives solitaires.

© Alejandro Guerrero.
Lui, Peter (Sylvain Katan), est le stéréotype du bourgeois, cadre dans une maison d'édition, "détenteur" patriarcal d'une femme, deux enfants, deux chats, deux perruches, le tout dans un appartement vraisemblablement luxueux d'un quartier chic et "bobo" de New York. L'autre, Jerry (Pierre Val), à l'opposé, est plutôt du côté de la pauvreté, celle pas trop grave, genre bohème, mais banale qui fait habiter dans une chambre de bonne, supporter les inconvénients de la promiscuité et rechercher ces petits riens, ces rares moments de défoulement ou d'impertinence qui donnent d'éphémères et fugaces instants de bonheur.

Les profils psychologiques des deux personnages sont subtilement élaborés, puis finement étudiés, analysés, au fil de la narration, avec une inversion, un basculement "dominant - dominé", s'inscrivant en douceur dans le déroulement de la pièce. La confrontation, involontaire au début, Peter se laissant tout d'abord porter par le récit de Jerry, devient plus prégnante, incisive, ce dernier portant ses propos plus sur des questionnements existentiels sur la vie, sur les injonctions à la normalité de la société et la réalité pitoyable – selon lui – de l'existence de Peter… cela sous prétexte d'une prise de pouvoir de son espace vital de repos qu'est le banc que celui-ci utilise pour sa pause déjeuner.

La rencontre fortuite entre ces deux humains est en réalité un faux-semblant, tout comme la prétendue histoire du zoo qui ne viendra jamais, Edward Albee (1928-2016) proposant ici une réflexion sur les dérives de la société humaine qui, au fil des décennies, a construit toujours plus de barrières entre elle et le vivant, créant le terreau des détresses ordinaires et des grandes solitudes. Ce constat fait dans les années cinquante par l'auteur américain de "Qui a peur de Virginia Woolf ?" se révèle plus que jamais d'actualité avec l'évolution actuelle de notre monde dans lequel l'individualisme a pris le pas sur le collectif.

Gil Chauveau
15/09/2023