La Revue du Spectacle, le magazine des arts de la scène et du spectacle vivant. Infos théâtre, chanson, café-théâtre, cirque, arts de la rue, agenda, CD, etc.



Augmenter la taille du texte
Diminuer la taille du texte
Partager
Pitchouns

"Semeurs de rêves" Une évocation du pouvoir des enfants et de leur possible force de conviction

Dans le village de Griseville, les habitants travaillent dur. C'est sans doute tout ce qu'ils savent faire. Leur communauté est bien réglementée. On ne doit rien y changer ! Ceux qui sortent des rails deviennent parjures et le serpent arrive à ses côtés sans jamais les quitter.



© TMT Photo.
© TMT Photo.
Un jour, deux étrangers un peu saltimbanques, un homme et une femme, arrivent dans le village, suscitant le mécontentement des Grisillois, adultes et enfants confondus et tous sans exception les rejettent d'emblée. On les considère comme "des romanichels, des utopistes, bref des parasites". Ces deux nouveaux arrivants découvrent une maison abandonnée, s'y installent et décident de lui redonner vie. Mais ces deux-là possèdent des graines de rêve qui contiennent la patience, le courage et la persévérance.

Ces graines parviendront-elles à transformer les habitudes sectaires et rigides des Grisillois ?

Lors du festival d'Avignon 2019, "Semeurs de rêves" a obtenu le prix de la jeune création de la région Sud et, toujours en 2019, le prix "Coup de pouce" du jury au festival Au bonheur des mômes en Haute-Savoie.

© TMT Photo.
© TMT Photo.
Un spectacle comme celui-ci, à 10 h 15 le matin, a toujours pour nous quelque chose d'enchanteur et de galvanisant. Notre longue expérience festivalière ne le démentira pas. Sans doute parce que la journée balbutie avant l'effervescence à venir que l'esprit s'éveille encore un peu dans les limbes du sommeil, prêt en tout cas à recevoir, à entendre, à se laisser guider. Simplement.

Ce fut le cas à nouveau en ce premier jour du festival d'Avignon et, à nouveau, nous n'avons pas été déçus(es). D'emblée, le spectateur est plongé dans les aventures des deux amis où les propos sérieux et largement "politiques" en filigrane n'étouffent pas la magie du conte, loin de là. Les enfants y prendront un plaisir incontestable, non sans s'interroger sur la raison pour laquelle des Grisillois laissent partir leurs veaux à l'abattoir ou encore (pour les plus éveillés peut-être) sur les raisons qui ont poussé une grand-mère à sacrifier sa vie en laissant de côté son amour de la chanson.

© TMT Photo.
© TMT Photo.
"Semeurs de rêves" est une forme quelque peu hybride qui ne dure que 55 minutes, mais on a la douce sensation d'avoir vécu une très longue histoire pleine de rebondissements. Le spectacle propose une esthétique fine entre un texte justement écrit et les arts mêlés conjuguant les marionnettes, le théâtre d'ombre, le film d'animation, le chant, la musique et la comédie.

Pas de revendications affichées de façon ostentatoire alors que portant, on y parle de préjugés, de conditionnements sociaux, de sexisme, de xénophobie ou encore de spécisme, d'alimentation vegan ou encore de la consommation de la viande.

Les plus jeunes spectateurs y découvriront un bien joli conte dans lequel le pouvoir des enfants et leur force de conviction sont nettement évoqués. Les adultes, quant à eux, y réfléchiront longtemps après et, si tant est qu'ils aient gardé leur âme d'enfant, ils passeront, eux aussi, une heure de spectacle poétique et magique sans se poser trop de questions sur les conditionnements sociaux envahissants pourtant évoqués.

© TMT Photo.
© TMT Photo.
"Semer des rêves, c'est impossible ! Pas sûr, répond la comédienne, il tient à chacun de semer sa graine à rêver et à continuer à la regarder pousser !"

La Compagnie Les Vagabonds des Étoiles et ses deux comédiens en Avignon, Charlotte Clément et Stefan Mandine, sont animés par une grande force de conviction. La scène, ils aiment ça et ils l'investissent avec brio pour notre plus grand plaisir.

Nous aurions bien aimé nous aussi, à la fin du spectacle, obtenir une de ces graines à rêver et quand la comédienne à la fin de la représentation nous a demandés quel était notre rêve personnel, nous sommes restés silencieux ! Ou alors, nous aurions dû suggérer que des spectacles comme celui-ci nous soient proposés plus souvent. Surtout par les temps que nous traversons…

Vu en juillet au Festival d'Avignon Off 2022.

"Semeurs de rêves"

© TMT Photo.
© TMT Photo.
Texte : Charlotte Clément.
Mise en scène : Charlotte Clément.
Avec : Charlotte Clément, Stefan Mandine.
Musiques originales et films d'animation : Stefan Mandine.
Décors et dessins : Benjamin Olinet.
Création lumières : Greg Mittelberger, Arnaud Bunel.
Par la Cie Les Vagabonds des Étoiles.
Pour toutes et tous à partir de 6 ans.
Durée : 55 minutes.

Tournée
15 octobre 2022 : Spot sur les quartiers, Point Favre, Chêne-Bourg (Suisse).
26 octobre 2022 : Salle Georges Brassens, Lunel (34).
8 novembre 2022 : Le Prisme,
 Élancourt (78).
18 novembre 2022 : La Micro-Folie, Sevran (93).
28 et 29 novembre 2022 : Espace Michel Simon
, Noisy-le-Grand (93).
9 décembre 2022 : La Mure Cinéma-Théâtre, La Mure (38).
9 et 10 janvier 2023 : Festival des Mômes, Maison Pour Tous, Saint-Christol-lez-Alès (30).
31 janvier et 1er février 2023 : Festival Momix, Salle du Hangar, Kingersheim (68).
18 février 2023 : Festival Coup de Projecteur, Le Geyser, Bellerive-sur-Allier (03).
23 février 2023 : Festival Rêves de Toile, Espace Jacques Tati, Orsay (91).r
23 mars 2023 : L'Arlequin, 
Mozac (63).

>> vagabondsdesetoiles.com

© TMT Photo.
© TMT Photo.

Brigitte Corrigou
Samedi 17 Septembre 2022

Nouveau commentaire :

Théâtre | Danse | Concerts & Lyrique | À l'affiche | À l'affiche bis | Cirque & Rue | Humour | Festivals | Pitchouns | Paroles & Musique | Avignon 2017 | Avignon 2018 | Avignon 2019 | CédéDévédé | Trib'Une | RV du Jour | Pièce du boucher | Coulisses & Cie | Coin de l’œil | Archives | Avignon 2021 | Avignon 2022 | Avignon 2023 | Avignon 2024 | À l'affiche ter




Numéros Papier

Anciens Numéros de La Revue du Spectacle (10)

Vente des numéros "Collectors" de La Revue du Spectacle.
10 euros l'exemplaire, frais de port compris.






À Découvrir

•Off 2024• "Mon Petit Grand Frère" Récit salvateur d'un enfant traumatisé au bénéfice du devenir apaisé de l'adulte qu'il est devenu

Comment dire l'indicible, comment formuler les vagues souvenirs, les incertaines sensations qui furent captés, partiellement mémorisés à la petite enfance. Accoucher de cette résurgence voilée, diffuse, d'un drame familial ayant eu lieu à l'âge de deux ans est le parcours théâtral, étonnamment réussie, que nous offre Miguel-Ange Sarmiento avec "Mon petit grand frère". Ce qui aurait pu paraître une psychanalyse impudique devient alors une parole salvatrice porteuse d'un écho libératoire pour nos propres histoires douloureuses.

© Ève Pinel.
9 mars 1971, un petit bonhomme, dans les premiers pas de sa vie, goûte aux derniers instants du ravissement juvénile de voir sa maman souriante, heureuse. Mais, dans peu de temps, la fenêtre du bonheur va se refermer. Le drame n'est pas loin et le bonheur fait ses valises. À ce moment-là, personne ne le sait encore, mais les affres du destin se sont mis en marche, et plus rien ne sera comme avant.

En préambule du malheur à venir, le texte, traversant en permanence le pont entre narration réaliste et phrasé poétique, nous conduit à la découverte du quotidien plein de joie et de tendresse du pitchoun qu'est Miguel-Ange. Jeux d'enfants faits de marelle, de dinette, de billes, et de couchers sur la musique de Nounours et de "bonne nuit les petits". L'enfant est affectueux. "Je suis un garçon raisonnable. Je fais attention à ma maman. Je suis un bon garçon." Le bonheur est simple, mais joyeux et empli de tendresse.

Puis, entre dans la narration la disparition du grand frère de trois ans son aîné. La mort n'ayant, on le sait, aucune morale et aucun scrupule à commettre ses actes, antinaturelles lorsqu'il s'agit d'ôter la vie à un bambin. L'accident est acté et deux gamins dans le bassin sont décédés, ceux-ci n'ayant pu être ramenés à la vie. Là, se révèle l'avant et l'après. Le bonheur s'est enfui et rien ne sera plus comme avant.

Gil Chauveau
14/06/2024
Spectacle à la Une

•Off 2024• Lou Casa "Barbara & Brel" À nouveau un souffle singulier et virtuose passe sur l'œuvre de Barbara et de Brel

Ils sont peu nombreux ceux qui ont une réelle vision d'interprétation d'œuvres d'artistes "monuments" tels Brel, Barbara, Brassens, Piaf et bien d'autres. Lou Casa fait partie de ces rares virtuoses qui arrivent à imprimer leur signature sans effacer le filigrane du monstre sacré interprété. Après une relecture lumineuse en 2016 de quelques chansons de Barbara, voici le profond et solaire "Barbara & Brel".

© Betül Balkan.
Comme dans son précédent opus "À ce jour" (consacré à Barbara), Marc Casa est habité par ses choix, donnant un souffle original et unique à chaque titre choisi. Évitant musicalement l'écueil des orchestrations "datées" en optant systématiquement pour des sonorités contemporaines, chaque chanson est synonyme d'une grande richesse et variété instrumentales. Le timbre de la voix est prenant et fait montre à chaque fois d'une émouvante et artistique sincérité.

On retrouve dans cet album une réelle intensité pour chaque interprétation, une profondeur dans la tessiture, dans les tonalités exprimées dont on sent qu'elles puisent tant dans l'âme créatrice des illustres auteurs que dans les recoins intimes, les chemins de vie personnelle de Marc Casa, pour y mettre, dans une manière discrète et maîtrisée, emplie de sincérité, un peu de sa propre histoire.

"Nous mettons en écho des chansons de Barbara et Brel qui ont abordé les mêmes thèmes mais de manières différentes. L'idée est juste d'utiliser leur matière, leur art, tout en gardant une distance, en s'affranchissant de ce qu'ils sont, de ce qu'ils représentent aujourd'hui dans la culture populaire, dans la culture en général… qui est énorme !"

Gil Chauveau
19/06/2024
Spectacle à la Une

•Off 2024• "Un Chapeau de paille d'Italie" Une version singulière et explosive interrogeant nos libertés individuelles…

… face aux normalisations sociétales et idéologiques

Si l'art de générer des productions enthousiastes et inventives est incontestablement dans l'ADN de la compagnie L'Éternel Été, l'engagement citoyen fait aussi partie de la démarche créative de ses membres. La présente proposition ne déroge pas à la règle. Ainsi, Emmanuel Besnault et Benoît Gruel nous offrent une version décoiffante, vive, presque juvénile, mais diablement ancrée dans les problématiques actuelles, du "Chapeau de paille d'Italie"… pièce d'Eugène Labiche, véritable référence du vaudeville.

© Philippe Hanula.
L'argument, simple, n'en reste pas moins source de quiproquos, de riantes ficelles propres à la comédie et d'une bonne dose de situations grotesques, burlesques, voire absurdes. À l'aube d'un mariage des plus prometteurs avec la très florale Hélène – née sans doute dans les roses… ornant les pépinières parentales –, le fringant Fadinard se lance dans une quête effrénée pour récupérer un chapeau de paille d'Italie… Pour remplacer celui croqué – en guise de petit-déj ! – par un membre de la gent équestre, moteur exclusif de son hippomobile, ci-devant fiacre. À noter que le chapeau alimentaire appartenait à une belle – porteuse d'une alliance – en rendez-vous coupable avec un soldat, sans doute Apollon à ses heures perdues.

N'ayant pas vocation à pérenniser toute forme d'adaptation académique, nos deux metteurs en scène vont imaginer que cette histoire absurde est un songe, le songe d'une nuit… niché au creux du voyage ensommeillé de l'aimable Fadinard. Accrochez-vous à votre oreiller ! La pièce la plus célèbre de Labiche se transforme en une nouvelle comédie explosive, électro-onirique ! Comme un rêve habité de nounours dans un sommeil moelleux peuplé d'êtres extravagants en doudounes orange.

Gil Chauveau
26/03/2024