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Danse

"Marelle/Que les corps modulent !" Morceaux en forme de marelle pour douze enfants et vingt-quatre mains

À la fois corps de ballet et orchestre, une douzaine d'enfants créent une nouvelle forme de spectacle en mouvement, s'appuyant sur un dispositif dans lequel chaque geste, chaque déplacement deviennent des prétextes à la production sonore, comme une marelle musicale. Guidée par le compositeur et metteur en scène Benjamin Dupé et le chorégraphe Étienne Fanteguzzi, ceux-ci nous offrent une expérience inédite de "chimie" acoustique et corporelle où la spontanéité et l'inventivité construisent un espace de création musicale et chorégraphique expérimental, à la fois drôle et poétique, mais surtout parfaitement maîtrisé.



© Christophe Raynaud de Lage.
© Christophe Raynaud de Lage.
Ici a lieu une pièce de concert dansée dont les interprètes sont des enfants. Tout est musique, tout est mouvement… tout devient vibratoire, percussif, musical, bruits, bruitages. Un univers sonore variable et mobile se crée où chacun devient musicien et instrumentiste, émetteur et preneur de sons, acteur et danseur sur des chorégraphies construites sur des partitions, élaborées ou pas, de notes imaginaires ou parfaitement concrètes, en direct, remarquablement maîtrisées… alors que, d'un premier abord, tout cela pourrait paraître improvisé…

La liste des possibles sonores est immense et le nombre d'instruments différents est quasi infini. L'espace carré - où la magie opère - prend la forme d'un atelier de lutherie en construction habité par des corps en discrète effervescence - tout est tellement sous contrôle que ça en est impressionnant - et joueurs, à l'écoute d'eux-mêmes et de l'environnement. Concentrés, filles et garçons sont les acteurs de cette pièce de concert qui navigue entre musiques de création, danse, art plastique, théâtre d'objets, cirque sonore et installation vivante. Tous, ayant la capacité à moduler, à s'adapter aux éléments présents, déploient avec une précision et une énergie dominée de nouveaux langages instrumentaux, technologiques, gestuelles et poétiques.

© Christophe Raynaud de Lage.
© Christophe Raynaud de Lage.
Pour concevoir ces langues inédites et novatrices, en manière d'inventaire à la Prévert, sont utilisés, interprétés ou joués, au fur et mesure ou en même temps - liste non exhaustive -, des boules de sacs en plastiques frottées, des balles rebondissantes, des coquilles subissant l'écrasement, des feuilles foulées, des chaises traînées, des percussions corporelles, des chaussons de papier (frout frout), des pantalons au tissu sonnant (pfuit pfuit), des bracelets tintant grâce à des grelots, un costume en vinyle pour reptation sur le tapis de danse (scrouitch scrouitch)…

… des échanges façon tennis avec une échelle comme filet et des raquettes "tambourins", un ballet de verres aux effets de percussions fines, des bruisseurs végétaux (tirés au sol, agités, frappés ou égrenés), des appeaux, trompes, klaxons, flûtes, sifflets et autres ocarinas, des monocordes sur charnières (entre berimbao et contrebassine), des matelas gonflés d'air alimentant un système de tuyauterie pour un nouveau type de cornemuse… plus divers dispositifs électroniques permettant d'utiliser des micros pour générer du larsen (micro sur perche à main manipulé par un danseur et des haut-parleurs présentés par d’autres) ou pour jouer du thérémine, etc.

© Christophe Raynaud de Lage.
© Christophe Raynaud de Lage.
Le spectacle est remarquable, mais ce qui l'est aussi, c'est ce que cela dit de la réussite du travail en amont avec les enfants qu'a initié Benjamin Dupé. Que ce soit les filles ou les garçons, on les sent complètement investis, restant concentré durant les cinquante minutes de représentation. Benjamin réussit la performance d'amener et de garder avec lui douze enfants de 7 à 11 ans tout au long d'une série de quinze ateliers de trois heures, basés sur un engagement à la présence pour participer à la finalisation sur scène, devant le public (à Strasbourg, trois séances sur deux jours).

Son talent n'est pas que celui d'un créateur, compositeur et metteur en scène, mais aussi celui d'un pédagogue formateur intelligent sachant conduire les autres sur des territoires certes inconnus, mais également ludiques et porteurs de nouveaux imaginaires pour l'enfance… et merveilleux, surprenant et innovant pour le public !

Vu à Pôle Sud - CDCN Strasbourg le 24 septembre 2022, dans le cadre du festival Musica.

"Marelle/Que les corps modulent !"

© Christophe Raynaud de Lage.
© Christophe Raynaud de Lage.
Création septembre 2022.
Pièce de concert dansée, pour douze à quinze enfants.
Une expérience sociale, sonore et corporelle in situ.
Concept et musique : Benjamin Dupé.
À Strasbourg, avec douze enfants des quartiers Meinau et Neudorf formés au projet en ateliers : Malou Bini, Philippe-Louis Dieux, Imane El Khabchi, Nino Flammen, Laïla Guizani, Ciara His, Evans His, Inès Jaeger, Grace-Éloïse Lema, Naïm Lemaire, Danyl Yousfi et Nadine Yousfi.
Espace, dispositifs instrumentaux et costumes sonores : Olivier Thomas, Benjamin Dupé.
Mouvement/chorégraphie : Étienne Fanteguzzi (région Grand Est), Balkis Moutashar (région Sud - PACA), Marine Colard (région Bourgogne-Franche-Comté), Marion Lévy (région Normandie), Thierry Thieû Niang (région Île-de-France)…
Lumière : Christophe Forey.
Son : Julien Frénois.
Par la Cie Comme je l'entends, les productions.
Durée : 50 minutes.
À partir de 8 ans.

Du 29 novembre au 3 décembre 2022.
Mardi à 19 h, jeudi à 14 h 30, vendredi à 14 h 30 et 19 h, samedi à 19 h.
KLAP - Maison pour la danse, 5 avenue Rostand, Marseille 3e, 04 96 11 11 20.
>> Kelemenis&Cie >> KLAP >> kelemenis.fr

Tournée
15, 16, 18 et 19 mars 2023 : Opéra de Dijon, Dijon (21).
14 et 15 juin 2023 : Théâtre de Caen, Caen (14).

Gil Chauveau
Mardi 22 Novembre 2022

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© Betül Balkan.
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On retrouve dans cet album une réelle intensité pour chaque interprétation, une profondeur dans la tessiture, dans les tonalités exprimées dont on sent qu'elles puisent tant dans l'âme créatrice des illustres auteurs que dans les recoins intimes, les chemins de vie personnelle de Marc Casa, pour y mettre, dans une manière discrète et maîtrisée, emplie de sincérité, un peu de sa propre histoire.

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© Philippe Hanula.
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Gil Chauveau
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