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Trib'Une

"Une vie" Se souvenir de Maupassant, de l'adolescence et du temps qui passe

La chronique d'Isa-belle L

Souvenirs adolescents, la lecture du roman : "Une Vie" de Maupassant. J'ai 15 ans.
Souvenirs d'une période tranquille où le destin de "Jeanne", l'héroïne, ne résonnait pas complètement du haut de nos délires adolescents.



© Lot.
© Lot.
Et le temps… Le champ s'élargit, les enfants quittent le nid, les parents vieillissent, les familles s'agrandissent, les parcours s'accomplissent, des chemins rétrécissent, des émotions renaissent et la vie passe inexorablement. C'est ainsi.

Puis, dans un théâtre à Paris, Maupassant, Jeanne, une vie, la sienne adaptée du roman, revient à l'esprit.

Saisie, j'ai été. Plongée au cœur du récit interprété magistralement par cette immense comédienne qu'est Clémentine Célarié. Embarquée avec elle dans le destin de Jeanne qui raconte sa vie. Quelle vie !

Nous avions quinze ans. Je n'étais pas seule, une amie m'accompagnait et je l'ai observée du coin de l'œil, émue, elle aussi, par la finesse de la comédienne tant habitée.

Jeanne, Clémentine, deux vies pour une soirée exceptionnelle. Il y a sûrement un peu de Clémentine dans Jeanne, la mer… la mère. Il y a du vécu, des larmes, des sourires et la renaissance d'un roman si renversant. La sobriété du décor, le soin apporté aux tenues, jusqu'aux accessoires et la mise en abîme de la comédienne.

© Lot.
© Lot.
Je lui ai parlé quelques instants en fin de représentation et il émane de Clémentine Célarié, un vrai naturel, une envie de partager et un désir de l'embrasser pour la remercier. La remercier d'être ce qu'elle est. Un être entier, habité, m'ayant permis le temps d'une superbe soirée de me remémorer mes 15 ans. Me souvenir de Guy de Maupassant et à quel point, la jeunesse file, le temps passe et qu'il est nécessaire de revenir parfois en arrière pour se rappeler de tous les magnifiques moments.

Les rêves, les désillusions, l'amour, la passion. Le manque, l'absence, les enfants…
Jeanne, c'est tout cela et la comédienne revient sur ce passé, endossant les joies, les peines.
À 15 ans, il y avait du rêve, la vie devant… Aujourd'hui, il y a le théâtre des Mathurins où brille sur scène une de nos plus grandes comédiennes et le passé de l'héroïne sous certains aspects parlent à toutes les femmes que nous devenons progressivement.

Plus qu'un moment fort de théâtre, c'est une pure merveille, comme la mer qui soudain se réveille et vivifie corps et esprit. L'adaptation à la scène d'une "Vie" de Maupassant est un plongeon dont on se relève avec une très grande émotion et des souvenirs à la pelle.
Inutile de vous dire de ne pas hésiter à aller applaudir jusqu'à vous lever, face à la performance de Clémentine Célarié.

"Une vie"

© Lot.
© Lot.
D'après le roman de Guy de Maupassant.
Mise en scène : Arnaud Denis.
Avec : Clémentine Célarié.
Scénographie : Hermann Batz.
Création lumières : Denis Koransky.
Créations Musicales : Carl Heibert et Abraham Diallo.
Durée : 1 h 20.

Du 4 octobre au 22 décembre 2019.
Du mardi au samedi à 19 h, dimanche à 16 h 30.
Théâtre des Mathurins, Grande Salle, Paris 8e, 01 42 65 90 00.
>> theatredesmathurins.com

Isabelle Lauriou
Mardi 29 Octobre 2019

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"Rimbaud Cavalcades !" Voyage cycliste au cœur du poétique pays d'Arthur

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© François Vila.
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Isabelle Lauriou
25/03/2024
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© Christophe Raynaud de Lage.
Côté cour, Ludivine Sagnier attend à côté de Pierre Belleville le démarrage du spectacle, avant qu'elle n'investisse le plateau. Puis, pleine lumière où V. (Ludivine Sagnier) apparaît habillée en bas de jogging et des baskets avec un haut-le-corps. Elle commence son récit avec le visage fatigué et les traits tirés. En arrière-scène, un voile translucide ferme le plateau où parfois V. plante ses mains en étirant son corps après chaque séquence. Dans ces instants, c'est presque une ombre que l'on devine avec une voix, continuant sa narration, un peu en écho, comme à la fois proche, par le volume sonore, et distante par la modification de timbre qui en est effectuée.

Dans cet entre-deux où le spectacle n'a pas encore débuté, c'est autant la comédienne que l'on voit qu'une inconnue, puisqu'en dehors du plateau et se tenant à l'ombre, comme mise de côté sur une scène pourtant déjà éclairée avec un public pas très attentif de ce qui se passe.

Safidin Alouache
21/03/2024
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Dans une mise en scène de Marie-Christine Orry et un texte d'Émilie Frèche, Sami Bouajila incarne, dans un monologue, avec superbe et talent, un personnage dont on ignore à peu près tout, dans un prisme qui brasse différents espaces-temps.

© Olivier Werner.
Lumière sur un monticule qui recouvre en grande partie le plateau, puis le protagoniste du spectacle apparaît fébrilement, titubant un peu et en dépliant maladroitement, à dessein, son petit tabouret de camping. Le corps est chancelant, presque fragile, puis sa voix se fait entendre pour commencer un monologue qui a autant des allures de récit que de narration.

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Safidin Alouache
12/03/2024