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Concerts

Le Trio Karénine au Festival Européen Jeunes Talents : la valeur n’attend décidément pas le nombre des années !

Pendant tout le mois de juillet, chaque soir, les mélomanes et les curieux sont invités à rencontrer les Jeunes Talents de demain dans un cadre inhabituel. C’est en effet à l’Hôtel de Soubise au cœur du Marais - qui abrite pour peu de temps encore les Archives nationales - que se déroule la douzième édition du Festival. C’est ainsi que se poursuit l’activité musicale dans ces lieux qu’avait initiée la cousine de Louis XIV, Marie de Lorraine, appelée Mademoiselle de Guise : les fameux "Concerts des Amateurs".



Trio Karénine © C. et B. Desjeux.
Trio Karénine © C. et B. Desjeux.
Plus de cinquante jeunes virtuoses issus des conservatoires de l’Europe entière - et lauréats de prix prestigieux - ont pour parrain cette année le grand chef Jean-Claude Casadesus, et pour mission de nous faire connaître un riche répertoire de musique de chambre français, allemand, russe, etc.

C’est le Trio Karénine qui a ouvert cette nouvelle édition avec un merveilleux programme de musique allemande : le fameux "Trio des Esprits" n°5 (opus 70) de Ludwig van Beethoven, le Trio opus 63 de Robert Schumann. Mais les (très) jeunes artistes ont brillé particulièrement en jouant les œuvres de la compositrice finlandaise Kaija Saariaho, invitée du Festival, et dont je vous conseille de retenir le nom.

Le violoncelliste Louis Rodde du Trio Karénine - formation créée en 2009 - nous a jeté un sort avec "Spins and Spells", écrit pour Mstislav Rostropovitch. Les charmantes Anna Göckel (violon) et Paloma Kouider (piano) se sont fait les initiatrices très talentueuses de territoires encore à explorer, celui des cordes frappées, pincées, frottées avec "Calices", une commande du Conservatoire Reine Sofia de Madrid de 2009. Brillantes couleurs des cordes, raucité des timbres, énergie torrentielle : une passion expressionniste habite ces jeunes interprètes, très communicative.

Ensemble Il Caravaggio, le 20 juillet © DR.
Ensemble Il Caravaggio, le 20 juillet © DR.
Ces jeunes musiciens, en tous points remarquables, avec leur fougue au service d’une impressionnante sûreté technique, ont enthousiasmé jusque dans le rappel, avec l’exécution magistrale du Pantoum du sublime Trio de Maurice Ravel. Bravo à Laurent Bureau, âme de ce Festival, de nous permettre de faire de telles découvertes ! Notons que chaque concert est précédé d’une petite conférence assurée par un musicologue pour une meilleure connaissance des œuvres jouées ensuite.

Ne ratez surtout pas les concerts suivants qui intégreront tous des œuvres de Kaija Saariaho dans leur programme. Vous aurez peut-être la chance de croiser sa haute silhouette élégante et son sourire timide : bref un compositeur vivant ! La nouveauté de cette édition, "Le Concert du Maître", c’est le pianiste internationalement reconnu Dominique Merlet jouant avec son élève Anna Buchberger.

Trois concerts gratuits sont également ouverts à tous les dimanches après-midis dans les jardins de la ville de Paris et d’Aulnay-sous-Bois pour atteindre un large public.

12e Festival Européen Jeunes Talents

Du 6 au 27 juillet 2012.
Hôtel de Soubise - Archives nationales, 60, rue des Francs-Bourgeois, Paris 3e.
Informations et réservations : 01 40 20 09 34.
Lieux des concerts : dans la Cour de Guise par beau temps (cour intérieure de l’hôtel particulier)
ou, par mauvais temps, dans le Hall d'accueil du CARAN (Centre d'accueil et de recherche des Archives nationales).

>> Programme complet.

Programme du concert donné le 6 juillet 2012

Trio Karénine : Anna Göckel, violon ; Louis Rodde, violoncelle ; Paloma Kouider, piano.
Kaija-Saariaho (née en 1952), Spin and Pells pour violoncelle seul (1996) ;
Ludwig van Beethoven (1770 - 1827), Trio n°5 en ré majeur, op. 70 "Geister-Trio",
Allegro vivace con brio - Largo assai ed espressivo - Presto-Finale ;
Kaija Saariaho (Née en 1952), Calices pour violon et piano (2009) ;
Robert Schumann (1810 – 1856), Trio, op. 63 en ré mineur,
Mit Energie und Leidenschaft (Avec énergie et passion),
Lebhaft, doch nicht zu rasch (Animé mais pas trop rapide),
Langsam, mit inniger Empfindung (Lent, avec un sentiment intime),
Mit Feuer (Avec feu).

Christine Ducq
Mardi 10 Juillet 2012

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Concerts | Lyrique







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"Lilou et Lino Le Voyage vers les étoiles" Petit à petit, les chats deviennent l'âme de la maison*

Qu'il est bon de se retrouver dans une salle de spectacle !
Qu'il est agréable de quitter la jungle urbaine pour un moment de calme…
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Je ne pensais pas dire cela en pénétrant une salle bondée d'enfants, mais au bruit du dehors, très souvent infernal, j'ai vraiment apprécié l'instant et le brouhaha des petits, âgés, de 3 à 8 ans.

© Delphine Royer.
Sur scène du Théâtre Essaïon, un décor représente une chambre d'enfant, celle d'une petite fille exactement. Cette petite fille est interprétée par la vive et solaire Vanessa Luna Nahoum, tiens ! "Luna" dans son prénom, ça tombe si bien. Car c'est sur la lune que nous allons voyager avec elle. Et les enfants, sages comme des images, puisque, non seulement, Vanessa a le don d'adoucir les plus dissipés qui, très vite, sont totalement captés par la douceur des mots employés, mais aussi parce que Vanessa apporte sa voix suave et apaisée à l'enfant qu'elle incarne parfaitement. Un modèle pour les parents présents dans la salle et un régal pour tous ses "mini" yeux rivés sur la scène. Face à la comédienne.

Vanessa Luna Nahoum est Lilou et son chat – Lino – n'est plus là. Ses parents lui racontent qu'il s'est envolé dans les étoiles pour y pêcher. Quelle étrange idée ! Mais la vie sans son chat, si belle âme, à la fois réconfortante, câline et surprenante, elle ne s'y résout pas comme ça. Elle l'adore "trop" son animal de compagnie et qui, pour ne pas comprendre cela ? Personne ce matin en tout cas. Au contraire, les réactions fusent, le verbe est bien choisi. Les enfants sont entraînés dans cette folie douce que propose Lilou : construire une fusée et aller rendre visite à son gros minet.

Isabelle Lauriou
15/05/2025
Spectacle à la Une

"Un Chapeau de paille d'Italie" Une version singulière et explosive interrogeant nos libertés individuelles face aux normalisations sociétales et idéologiques

Si l'art de générer des productions enthousiastes et inventives est incontestablement dans l'ADN de la compagnie L'Éternel Été, l'engagement citoyen fait aussi partie de la démarche créative de ses membres. La présente proposition ne déroge pas à la règle. Ainsi, Emmanuel Besnault et Benoît Gruel nous offrent une version décoiffante, vive, presque juvénile, mais diablement ancrée dans les problématiques actuelles, du "Chapeau de paille d'Italie"… pièce d'Eugène Labiche, véritable référence du vaudeville.

© Philippe Hanula.
L'argument, simple, n'en reste pas moins source de quiproquos, de riantes ficelles propres à la comédie et d'une bonne dose de situations grotesques, burlesques, voire absurdes. À l'aube d'un mariage des plus prometteurs avec la très florale Hélène – née sans doute dans les roses… ornant les pépinières parentales –, le fringant Fadinard se lance dans une quête effrénée pour récupérer un chapeau de paille d'Italie… Pour remplacer celui croqué – en guise de petit-déj ! – par un membre de la gent équestre, moteur exclusif de son hippomobile, ci-devant fiacre. À noter que le chapeau alimentaire appartenait à une belle – porteuse d'une alliance – en rendez-vous coupable avec un soldat, sans doute Apollon à ses heures perdues.

N'ayant pas vocation à pérenniser toute forme d'adaptation académique, nos deux metteurs en scène vont imaginer que cette histoire absurde est un songe, le songe d'une nuit… niché au creux du voyage ensommeillé de l'aimable Fadinard. Accrochez-vous à votre oreiller ! La pièce la plus célèbre de Labiche se transforme en une nouvelle comédie explosive, électro-onirique ! Comme un rêve habité de nounours dans un sommeil moelleux peuplé d'êtres extravagants en doudounes orange.

Gil Chauveau
11/03/2024
Spectacle à la Une

"La vie secrète des vieux" Aimer même trop, même mal… Aimer jusqu'à la déchirure

"Telle est ma quête", ainsi parlait l'Homme de la Mancha de Jacques Brel au Théâtre des Champs-Élysées en 1968… Une quête qu'ont fait leur cette troupe de vieux messieurs et vieilles dames "indignes" (cf. "La vieille dame indigne" de René Allio, 1965, véritable ode à la liberté) avides de vivre "jusqu'au bout" (ouaf… la crudité revendiquée de leur langue émancipée y autorise) ce qui constitue, n'en déplaise aux catholiques conservateurs, le sel de l'existence. Autour de leur metteur en scène, Mohamed El Khatib, ils vont bousculer les règles de la bienséance apprise pour dire sereinement l'amour chevillé au corps des vieux.

© Christophe Raynaud de Lage.
Votre ticket n'est plus valable. Prenez vos pilules, jouez au Monopoly, au Scrabble, regardez la télé… des jeux de votre âge quoi ! Et surtout, ayez la dignité d'attendre la mort en silence, on ne veut pas entendre vos jérémiades et – encore moins ! – vos chuchotements de plaisir et vos cris d'amour… Mohamed El Khatib, fin observateur des us et coutumes de nos sociétés occidentales, a documenté son projet théâtral par une série d'entretiens pris sur le vif en Ehpad au moment de la Covid, des mouroirs avec eau et électricité à tous les étages. Autour de lui et d'une aide-soignante, artiste professionnelle pétillante de malice, vont exister pleinement huit vieux et vieilles revendiquant avec une belle tranquillité leur droit au sexe et à l'amour (ce sont, aussi, des sentimentaux, pas que des addicts de la baise).

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30/08/2024