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Danse

"Dub" Unité et harmonie dans la différence !

La dernière création d'Amala Dianor nous plonge dans l'univers du Dub. Au travers de différents tableaux, le chorégraphe manie avec rythme et subtilité les multiples visages du 6ᵉ art dans lequel il bâtit un puzzle artistique où ce qui lie l'ensemble est une gestuelle en opposition de styles, à la fois virevoltante et hachée, qu'ondulante et courbe.



© Pierre Gondard.
© Pierre Gondard.
En arrière-scène, dans une lumière un peu sombre, la scénographie laisse découvrir sept grands carrés vides disposés les uns sur les autres. Celui situé en bas et au centre dessine une entrée. L'ensemble représente ainsi une maison, grande demeure avec ses pièces vides.

Devant cette scénographie, onze danseurs investissent les planches à tour de rôle, chacun y apportant sa griffe, sa marque par le style de danse qu'il incarne, comme à l'image du Dub, genre musical issu du reggae jamaïcain dont l'origine est due à une erreur de gravure de disque de l'ingénieur du son Osbourne Ruddock, alias King Tubby, en mettant du reggae en version instrumentale. En 1967, en Jamaïque, le disc-jockey Rudy Redwood va le diffuser dans un dance floor. Le succès est immédiat.

L'apogée du Dub a eu lieu dans les années soixante-dix jusqu'au milieu des années quatre-vingt. Les codes ont changé depuis, le mariage d'une hétérogénéité de tendances musicales est, depuis de nombreuses années, devenu courant. Le Dub met en exergue le couple rythmique basse et batterie en lui incorporant des effets sonores. Awir Leon, situé côté jardin derrière sa table de mixage, est aux commandes.

© Pierre Gondard.
© Pierre Gondard.
Cela démarre par une danse très ondulée avec les pieds et les mains de l'artiste qui, à l'aide de ses genoux, se plient jusqu'au sol pour ensuite remonter. Il y a une grande fluidité dans sa gestuelle, le tronc étant l'axe sur lequel ses membres inférieurs et supérieurs oscillent dans un périmètre réduit. D'autres interprètes l'accompagnent avec une grammaire corporelle différente, tout en créant une cohérence artistique.

Plus loin, c'est un artiste qui s'allonge en se courbant le tronc, en posant ses jambes sur les planches, pour ensuite opérer une légère remontée en effectuant un sursaut des hanches. Le corps est gracieusement rampant, tout en étant légèrement en hauteur. Il avance telle une chenille par mouvements glissants. Plus loin, une danseuse, de type dance floor, a des mouvements très vifs, tranchés et rapides, la plante des pieds bien au sol. Quand plus loin, des mouvements hip-hop à même les planches s'effectuent. Ces différentes chorégraphies sont parfois effectuées dans un même laps de temps. Dans des danses de groupe, les plats des pieds tapent au sol, de façon rythmée ; les bras sont levés pour redescendre et partir ensuite en diagonale et de côté, le tout de façon synchronisée.

© Pierre Gondard.
© Pierre Gondard.
À dessein, il y a une complicité entre les artistes avec lesquels s'immisce l'humour. Ce sont des vagues successives chorégraphiques qui apparaissent sous forme de tableaux, toutes reliées les unes aux autres. La dramaturgie met en avant l'unité dans ses différences, la trame du spectacle. C'est une troupe avec ses variantes artistiques, dans laquelle une hétérogénéité de styles de danse existe. En passant des uns aux autres, nous découvrons des gestuelles qui ont des points communs, celles de bras qui ondulent avec un tronc qui en fait de même. Quand, plus loin, se dessinent des mouvements brisés et hachés. C'est dans ce va-et-vient de gestiques aux formes et allures différentes et complémentaires que se dégage une harmonie, le tout souvent dans une même chorégraphie.

La musique accompagne la représentation au travers d'une ligne de basse et de percussions. L'expression corporelle est très rythmée, avec les plats des pieds devenant parfois le parangon de celle-ci, comme le taconeo pour le Flamenco ou les bottes pour la gumboot dance.

Dans la scénographie représentant la grande maison, trois danseurs sont répartis respectivement dans trois pièces situées en haut, à gauche et à droite de celle-ci. Une cohérence artistique se dégage des gestiques dans leur tension, attitude, posture, bien que séparées et presque isolées les unes des autres. Ce qui est montré et ce qui fait unité peut ainsi avoir une focale aveugle. La scénographie peut suffire à cimenter l'ensemble, avec un musicien aux commandes qui bat la mesure pour marquer le tempo.

Dans le tableau final, les artistes se déplacent en trio et par vague successive. À tour de rôle, ils montent de façon rythmée et cadencée vers l'avant-scène, puis laissent leur place au trio suivant pour redescendre vers le fond de scène, le tout dans une très belle dynamique pleine d'harmonie.

C'est beau, frais, coloré et très vivant.
◙ Safidin Alouache

"Dub"

© Pierre Gondard.
© Pierre Gondard.
Chorégraphie : Amala Dianor.
Avec : Slate Hemedi Dindangila, Romain Franco, Jordan John Hope, Enock Kalubi Kadima, Mwendwa Marchand, Kgotsofalang Joseph Mavundla, Sangram Mukhopadhyay, Tatiana Gueria Nade, Yanis Ramet, Germain Zambi, Asia Zonta
Musicien : Awir Leon.
Art visuel : Grégoire Korganow.
Musique : Awir Leon.
Lumières : Nicolas Tallec.
Costumes : Minuit Deux, Fabrice Couturier.
Production Kaplan - Cie Amala Dianor.
Durée : 1 h.

Le spectacle s'est déroulé du 11 au 14 décembre 2024 au Théâtre de la Ville Sarah Bernhardt à Paris.
Théâtre de la Ville
>> theatredelaville-paris.com

© Pierre Gondard.
© Pierre Gondard.
Tournée
18 décembre 2024 : Le Corum (dans le cadre de Montpellier Danse), Montpellier (34).
7 février 2025 : Le Forum, Fréjus (83).
11 et 12 février 2025 : Grand Théâtre du Luxembourg, Luxembourg.
28 février 2025 : Equinoxe - scène nationale, Châteauroux (36).
4 mars 2025 : L'Onde, Vélizy-Villacoublay (78).
7 mars 2025 : La Bateau Feu - scène nationale de Dunkerque (dans le cadre du Festival Le Grand Bain, Le Gymnase CDCN), Dunkerque (59).
11 et 12 mars 2025 : Théâtre du Nord - CDN (dans le cadre du Festival Le Grand Bain, Le Gymnase CDCN), Lille (59).
14 mars 2025 : Espace 1789, Saint-Ouen-sur-Seine (93).
18 et 19 mars 2025 : Théâtre Sénart, Lieusaint (77).
4 juin 2025 : Opéra Limoges (87).

© Pierre Gondard.
© Pierre Gondard.

Safidin Alouache
Mardi 17 Décembre 2024

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Balade équestre dans l'univers singulier de Bartabas… et de Zingaro, un théâtre pour les chevaux

Forte de quarante ans d'observation de la compagnie Zingaro, de ses évolutions et métamorphoses, ainsi que d'une écoute attentive des murmures émanant de la relation entre Bartabas et ses chevaux, Fabienne Pascaud nous offre une exploration aux confins de la création équestre pour découvrir les sources originelles et intimes de son art au cours de douze grands chapitres, chacun scrutant un aspect différent de la pensée créatrice de cet artiste visionnaire.

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C'est en 1978, lors de son premier Festival d'Avignon, que Fabienne Pascaud découvre Bartabas. Pour ce dernier, c'est l'époque "Cirque Aligre", après le Théâtre Emporté et avant Zingaro. Surnommé Bartabas le Furieux, il véhicule déjà une certaine folie, à la fois créatrice et unique, et une grande curiosité. Sa créativité va très vite puiser son inspiration dans la richesse de l'ailleurs, dans les différents aspects du monde…

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Gil Chauveau
17/12/2024
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17/12/2024
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© DR.
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Bruno Fougniès
13/12/2024