© Pierre Planchenault.
"L'amour fou" d'André Breton chantant l'apologie du désir comme "seul ressort du monde" trouve un écho vivant dans ce long poème écrit par Jean Genet fantasmant "à mort" sur un magnifique assassin. À un détail près cependant… Si le pape du surréalisme portait en étendard les fantasmagories de l'amour convulsif, il restait dans le cadre d'une sexualité hétéronormée en accord avec les préceptes de la société bourgeoise. Dans la cellule où il était alors incarcéré pour un vol de livres, "Saint Genet, comédien et martyr" – comme le dénomme Jean-Paul Sartre – n'a lui que faire des normes sexuelles ou autres et sa vérité n'est pas la vérité commune, mais celle d'une "cosmogonie sacrée" mêlant à l'envi références religieuses et saillies érotiques (cf. Breton : "La pornographie, c'est l'érotisme des autres") dans un même souffle lyrique nourri par l'impérieux désir de la chair.
Se présentant comme un poème lyrique écrit en alexandrins de haut vol distribués en quatrains de facture impeccable, "Le Condamné à mort" allie avec une virtuosité sans pareille les références à la sainte religion et le langage cru des extases homosexuelles. Convoquant plusieurs points de vue, s'enlacent à les confondre le "je" du poète amoureux fou et celui du jeune assassin à la figure d'archange. Figures de la rébellion fondues dans le même corps, confondues dans la même âme, et s'accouplant fantasmatiquement.
Se présentant comme un poème lyrique écrit en alexandrins de haut vol distribués en quatrains de facture impeccable, "Le Condamné à mort" allie avec une virtuosité sans pareille les références à la sainte religion et le langage cru des extases homosexuelles. Convoquant plusieurs points de vue, s'enlacent à les confondre le "je" du poète amoureux fou et celui du jeune assassin à la figure d'archange. Figures de la rébellion fondues dans le même corps, confondues dans la même âme, et s'accouplant fantasmatiquement.
© Giulio Boato.
Accueillis par les notes d'un chant religieux s'élevant jusqu'aux cintres, les invités de cette cérémonie intimiste célébrant l'amour irrésistible d'un poète voyou pour un bel assassin prennent place sur les chaises disposées en cercle autour du lit vide. Seule la voix grave et infiniment douce du récitant trouera le silence qui s'ensuit. Faisant sienne la sensualité des mots de Jean Genet, il s'en fera l'écho sensible. Les mots succèderont aux mots, les images aux images pour éclairer crûment et non moins magnifiquement le dur désir d'aimer. Et même lorsque la voix chargée d'émotion palpable susurre, même si certains mots de l'ordre de la confidence peuvent rester en suspens, l'épiphanie païenne à résonances sacrées opère…
Invités à partager cette invitation au voyage au pays des amours homosexuelles, on se laisse bercer par le rythme des alexandrins libérant leur flux régulier d'images explosives… "Rêvons ensemble, Amour, à quelque dur amant/Il nous bouclera nus dans ces auberges sombres/Entre ses cuisses d'or, sur son ventre fumant".
Le soleil noir de l'érotisme débridé, affranchi de toute pesanteur conventionnelle, irradie l'espace plongé dans une semi-obscurité d'où surgit un flot d'images choc… "Colle ton corps ravi contre le mien qui meurt/D'enculer la plus tendre et douce des fripouilles./En soupesant charmé tes rondes, blondes couilles,/Mon vit de marbre noir t'enfile jusqu'au cœur". Difficile d'imaginer une plus tendre déclaration d'amour formulée par un prisonnier poète, fantasmant sur celui qu'il ne pourra que désirer… éperdument : "Mon Dieu, je vais claquer sans te pouvoir presser/Dans ma vie une fois sur mon cœur et ma pine !".
Au-delà de toute orientation sexuelle, saisis de part en part par cet oratorio où le tragique amoureux atteint l'incandescence, nous ressentons une fascination pour ce "Condamné à mort" porté par un interprète des plus inspirés faisant résonner, dans un décor à l'unisson, les versets de cet éblouissant chant païen à la gloire de "l'Amore" éternel.
◙ Yves Kafka
Vu le samedi 13 septembre 2025 à L'Atelier des Marches, Le Bouscat (33).
Invités à partager cette invitation au voyage au pays des amours homosexuelles, on se laisse bercer par le rythme des alexandrins libérant leur flux régulier d'images explosives… "Rêvons ensemble, Amour, à quelque dur amant/Il nous bouclera nus dans ces auberges sombres/Entre ses cuisses d'or, sur son ventre fumant".
Le soleil noir de l'érotisme débridé, affranchi de toute pesanteur conventionnelle, irradie l'espace plongé dans une semi-obscurité d'où surgit un flot d'images choc… "Colle ton corps ravi contre le mien qui meurt/D'enculer la plus tendre et douce des fripouilles./En soupesant charmé tes rondes, blondes couilles,/Mon vit de marbre noir t'enfile jusqu'au cœur". Difficile d'imaginer une plus tendre déclaration d'amour formulée par un prisonnier poète, fantasmant sur celui qu'il ne pourra que désirer… éperdument : "Mon Dieu, je vais claquer sans te pouvoir presser/Dans ma vie une fois sur mon cœur et ma pine !".
Au-delà de toute orientation sexuelle, saisis de part en part par cet oratorio où le tragique amoureux atteint l'incandescence, nous ressentons une fascination pour ce "Condamné à mort" porté par un interprète des plus inspirés faisant résonner, dans un décor à l'unisson, les versets de cet éblouissant chant païen à la gloire de "l'Amore" éternel.
◙ Yves Kafka
Vu le samedi 13 septembre 2025 à L'Atelier des Marches, Le Bouscat (33).
"Le condamné à mort"
© Nicolas Meusnier.
Texte : Jean Genet
Conception, scénographie et voix : Jean-Luc Terrade.
Création sonore : Karina Ketz.
Structure : Yoann Pénard.
Durée : 30 minutes.
Créé au festival Trente Trente en janvier 2025, repris ici dans une installation intimiste et audio.
A été représenté les jeudi 11 et vendredi 12 septembre 2025 (18 h 30, 19 h 15 et 20 h), et le samedi 13 septembre 2025 (16 h, 16 h 45, 17 h 30, 18 h 15, 19 h, 19 h 45) à l'Atelier des Marches, Le Bouscat (près de Bordeaux).
Conception, scénographie et voix : Jean-Luc Terrade.
Création sonore : Karina Ketz.
Structure : Yoann Pénard.
Durée : 30 minutes.
Créé au festival Trente Trente en janvier 2025, repris ici dans une installation intimiste et audio.
A été représenté les jeudi 11 et vendredi 12 septembre 2025 (18 h 30, 19 h 15 et 20 h), et le samedi 13 septembre 2025 (16 h, 16 h 45, 17 h 30, 18 h 15, 19 h, 19 h 45) à l'Atelier des Marches, Le Bouscat (près de Bordeaux).