Danse

"La jeune fille et la mort"… à couper le souffle !

"La jeune fille et la mort", Théâtre national de Chaillot, Paris

Les Grands Ballets Canadiens de Montréal font honneur à leur devise "Faire bouger le monde. Autrement" en invitant des artistes de renom comme Stephan Thoss qui marie avec aisance danses classique et contemporaine.



© Damian Siqeiros.
Fondés en 1957 par Ludmilla Chiriaeff* (1924-1996), Les Grands Ballets Canadiens de Montréal renouent une troisième fois avec le chorégraphe allemand Stephan Thoss qui avait déjà présenté "Searching for home", première nord-américaine sur la scène montréalaise en 2011, et "La jeune fille et la Mort" en 2015 en première mondiale. Ce dernier spectacle était inédit en France.

De belles symétries, aux mouvements variés et de même cadence, sont effectuées dans une gestuelle, souvent élancée, parfois à l'arrêt, comme un recueillement corporel après une course-poursuite contre la mort. Une mort qui est mêlée à la vie. "La vie nous offre la chance de vivre sans angoisses si nous voyons la mort comme lui étant totalement incorporée. Il importe peu que nous en ayons peur ou non. Mon nouveau ballet, quant à lui, dit "oui" aux deux", dit Stephan Thoss. Et sur scène, cette imbrication est effectuée avec des pas de deux, incarnant la vie, et par des hommes en noir, symbolisant la mort, telles des ombres personnifiant le temps, la maladie et le silence.

Les déplacements s'enchaînent dans de grandes envolées où les membres inférieurs glissent avec rythme sur la scène quand les bras ont des allures élancées. La chorégraphie est assortie de multiples pas de deux, représentant les quatre éléments, eau, air, terre et feu.

© Damian Siqeiros.
L'espace est investi dans toutes ses dimensions où la figure du danseur est à la fois le Yang d'un Yin et l'élément d'une chaîne où il participe à une mosaïque artistique aux accents variés. Pétale d'une fleur, son rapport à l'autre est autant pluriel que duel faisant du spectacle, un bouquet coloré aux maintes cadences sur des musiques, entre autres, de Franz Schubert (1797-1828), Philip Glass, Nick Cave et Trent Reznor.

C'est Antigone sur scène bravant la mort. Mais une Antigone joyeuse, aux couleurs vives, blanc, rouge ou bleu, incarnant la vie dans toute sa plénitude avec une gestuelle aérienne, à un rythme bousculant le fond chorégraphique. Comme des pétales de rose sur un lit mortuaire.

Les pas de deux se lient entre eux, parfois deux à deux, ou se greffent à un ensemble d'interprètes aux couleurs sombres, aux déplacements proches du sol donnant du volume et une autre vitesse à ceux-là. Les rythmes ont ainsi deux tempos composant un univers artistique où une pluie de lumières semble sortir d'un clair-obscur avec éclat.

C'est frais, léger, et construit par Stephan Thoss de façon remarquable. Le spectacle se finit avec une danseuse qui vient à l'avant-scène, habillée d'une robe bleue, une valise à la main. Et vu l'accueil très chaleureux du public, nous aurions bien aimé qu'elle ne parte pas.

* Ludmilla Chiriaff avait clamé que "la danse appartient au Québec". Elle est considérée comme la "Mère" de la danse québécoise.

"La jeune fille et la mort"

© Damian Siqeiros.
Direction artistique : Gradimir Pankov.
Chorégraphie et décor : Stephan Thoss.
Costumes : Jelena Miletic.
Lumières : Marc Parent.
Musique : Philip Glass, Nick Cave et Warren Ellis, Alexandre Desplat, Clint Mansell, Finnbogi Petursson, Rachel Portman, Trent Reznor et Atticus Ross, Franz Schubert (avec arrangements de Gustav Mahler), Christopher Young.
Avec : Marcin Kaczorowski, Valentine Legat, Chisato Ide, Vera Kvarcakova, Sahra Maira, Célestin Boutin, Mahomi Endoh, Ruben Julliard, Jérémy Galdeano, Chen Seng, Eline Malègue, Jerimy Rivera, Sarah Kingston, Jérémy Raia, Vanesa G.R. Montoya, Stephen Satterfield, Diana Léon, Rubén Julliard, Troy Herring, Emma Garau Cima, Esabelle Chen, Renata Commisso, Jacqueline Lopez, Eléonore Thomas, Leigh Andrew Alderson, Jean-Sébastien Couture, Myles Lavallée, Anya Nesvitaylo, Christie Partelow, Ryo Shimizu, Matthew Cluff, Andrew Wright.
Durée : 1 h 25.

Du 9 au 17 mars 2017.
Du mardi au samedi à 20 h 30 sauf jeudi 16 à 19 h 30 et dimanche à 15 h 30.
Théâtre National de Chaillot, salle Jean Vilar, Paris 16e, 01 53 65 30 00.
>> theatre-chaillot.fr

Safidin Alouache
Mardi 14 Mars 2017
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