Théâtre

"La Mort de Danton"… Entre antagonismes et chocs des vérités, au rythme d'un thriller !

"La Mort de Danton", Théâtre de la Bastille, Paris

Danton et Robespierre, compagnons de route dans l'énergie et la pensée, bâtisseurs sans frein de l'égalité entre les hommes, de la force de la Loi commune, de la souveraineté du peuple, se retrouvent à la bifurcation des destins.



© Victor Tonelli.
Dans "La Mort de Danton", près de quarante ans après la révolution française, Georges Büchner, dans un suivi scrupuleux de l’enchaînement des faits, décrit l'affrontement ultime de deux caractères, de deux points de vue. C'est le pic de la Terreur, Danton et Robespierre s'affrontent conduits bien au-delà de ce qu'ils pensaient d'eux-mêmes. La pièce à la précision quasi médicale est dense et convulsive. Passionnante.

Entre opposition au mouvement, et son accompagnement ou son accélération, entre la mort et la vie. La révolution échappe à la maîtrise, au désir de vivre. Malheur à ceux qui n'évoluent pas, malheur à ceux qui évoluent. En dévorant l'ordre ancien, la révolution dévore ses propres enfants. Jusqu'au terme. Les hommes ne font pas les révolutions, ce sont les révolutions qui les font.

François Orsoni, qui met en scène, installe le public dans un dispositif bi-frontal de part et d'autre d'une longue table. À ses extrémités siègent Danton et Robespierre. Éloignés l'un de l'autre. Les autres personnages dans la nervosité tournent autour dans une course éperdue à l'unité.

© Victor Tonelli.
Joués par cinq comédiens, les personnages dialoguent, se distribuent les rôles, dans le mouvement et l'énergie. La parole court. Le verbe est action, les nouveaux mots de république, de liberté, d'égalité, de peuple et de citoyens claquent et trouvent leur place dans la passion et la tragédie. Maximilien, Georges, Louis Antoine, Camille Lucile Julie, les personnages défilent et les autres... fantômes des massacres de septembre, charrettes de condamnés. Indulgents ou exagérés. Danton part, entouré d'un cortège de spectres.

Les personnages de Robespierre (Jean-Louis Coulloc'h) et de Danton (Mathieu Genet) sont incarnés par des acteurs à contre emploi physique du rôle. Robespierre a la carrure impressionnante : il porte la toute-puissance et la détermination, la nécessité de la Terreur. Danton est presque malingre, à la voix courte. Il est fatigué. Son tribunal extraordinaire qui devait arrêter les massacres spontanés est devenu une machine à tuer. Les personnages ne sont plus qu'antagonismes et chocs des vérités.

La théâtralité proposée est juste. Le temps est concentré. Le spectateur est saisi au rythme d'un thriller. Il applaudit.

"La Mort de Danton"

© Victor Tonelli.
Texte : Georg Büchner.
Traduction : Arthur Adamov.
Mise en scène : François Orsoni.
Avec : Brice Borg, Jean-Louis Coulloc'h, Mathieu Genet, Alban Guyon et Jenna Thiam.
Dramaturgie : Olivia Barron.
Costumes : Pascal Saint André.
Perruques : Cécile Larue & Ludovic Binet.
Régie générale : Antoine Seigneur-Guerrini & François Burelli.
Scénographie : Pierre Nouvel.
Son : Rémi Berger.
Musique : Thomas Landbo & Rémi Berger.
Par le Théâtre de NéNéKa.

Du 16 février au 4 mars 2017.
À 20 h. Relâche les 19, 23 et 26 février.
Théâtre de la Bastille; Paris 11e, 01 43 57 42 14.
>> theatre-bastille.com

Jean Grapin
Lundi 27 Février 2017
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