Théâtre

"Crocodiles" Épopée toute simple… d'un enfant lancé par sa mère dans l'aventure de la vie

Depuis le printemps 2017, le spectacle de Cendre Chassanne et Carole Guittat, "Crocodiles" tiré du récit de Fabio Geda "Dans la mer il y a des crocodiles", chemine et progresse dans le succès. L'histoire vraie d'Enaiatollah Akbari a trouvé une forme scénique qui remplit toutes les attentes du Théâtre . C'est-à-dire : se divertir, partager des émotions, apprendre, comprendre la fragilité des destins et l'évitement de la fatalité. À l'effet d'autant plus puissant que le périple est tiré d'une histoire vécue.



© Mat Jacob.
Elle est celle de cet enfant Hazara qui, pour échapper à l'esclavage, au travail forcé, connaît les filières de migrations clandestines et qui, après avoir erré comme Ulysse entre l'Afghanistan, l'Iran, la Turquie, la Grèce, l'Italie (autant de périls, autant de péripéties) trouve enfin un havre de paix et d'accueil.

Il y a dans la proposition scénique de Cendre Chassanne comme une manière optimiste, vitale presque enfantine de faire revivre les hasards et les transformer par le geste théâtral en "vouloir croire" du spectateur.

Depuis sa création, "Crocodiles" a étonnamment mûri. À la fois le même et différent, le spectacle est comme intensifié, détaché de toutes les contingences imposées par le plateau. Celui-ci en effet multiplie les contraintes. Le dispositif étant bi-frontal, le spectateur est sollicité par le croisement des proximités du jeu, d'un public en face de lui et de films projetés en panoramique au lointain qui appuient les étapes du récit. Au risque de la dispersion d'attention.

© Mat Jacob.
Le comédien tient la médiane en toute rigueur. Plongé dans un état de joie de vivre sur scène, il joue de sa présence effective. Au fil de son récit, il fait des boucles dans l'espace. En bateleur attentionné, il crée tous les avatars. De tout son corps, avec une énergie généreuse, de l'extrémité de ses doigts, projetant son sourire, il élargit sans cesse l'horizon de sa parole au-delà de toutes les images.

Le comédien se meut avec bonheur, tient le fil invisible qui relie les mondes : celui du récit avec ses ellipses, celui de la scène avec ses attributs (ses guindes, ses rideaux), celui du personnage (ses avanies, ses doutes). Avec cette proposition, il semble avancer sur le fil de son rêve et de sa réalité . Il est un funambule et toute représentation n'a plus qu'une origine. L' ACTEUR.

Dans "Crocodiles", le théâtre atteint instantanément la bonne température, celle du frémissement qui parcourt l'échine des spectateurs, celle de la rencontre avec Enaiatollah soudain si proche.

"Crocodiles ?" Une épopée toute simple comme on les aime. Celle d'un enfant aventureux qui, lancé par sa mère dans l'aventure de la vie, fait des ricochets. Comme tous les enfants.

"Crocodiles"

© Mat Jacob.
"L'histoire vraie d'Enaiatollah Akbari"
D'après "Dans la mer il y a des crocodiles" de Fabio Geda.
Adaptation et mise en scène : Cendre Chassanne, Carole Guittat.
Avec : Rémi Fortin (du 2 au 11 février) ou Zacharie Lorent (du 27 janvier au 1er février inclus).
Images : Mat Jacob/Tendance floue.
Montage : José Chidlovsky.
Création lumière et régie générale : Sébastien Choriol.
Création son et régie lumière, son, vidéo : Édouard Alanio.
Construction du dispositif scénique : Sébastien Choriol, Édouard Alanio, J-B. Gillet.
Production Compagnie Barbès 35.
Durée : 55 minutes.
À partir de 9 ans.

© Mat Jacob.
Du 27 janvier au 11 février 2020.
Samedi à 18 h, dimanche à 17 h.
Relâche en semaine sauf deux dates (vacances scolaires) : lundi 10 et mardi 11 février à 15 h.
Représentations scolaires du lundi 27 janvier au vendredi 7 février, à 10 h et 14 h 30.
Nouveau théâtre de Montreuil - CDN, Salle Maria Casarès, Montreuil (93), 01 48 70 48 90.
>> nouveau-theatre-montreuil.com

Jean Grapin
Lundi 3 Février 2020
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