Lyrique

Création française de "Der Ferne Klang" à l’Opéra national du Rhin : un son résolument européen

Pour l’ouverture de sa saison d’opéra, l’excellente maison strasbourgeoise dirigée par Marc Clémeur, propose "Der Ferne Klang" ("Le Son lointain") du compositeur austro-hongrois Franz Schreker, commémorant ainsi le centenaire de sa création à Francfort en 1912. Cette nouvelle production est l’occasion de faire connaître le compositeur le plus célèbre de son temps - avec Richard Strauss - de la République de Weimar.



© Alain Kaiser.
Pour fêter ses quarante ans d’existence, l’Opéra national du Rhin n’aurait pu choisir meilleur symbole du cosmopolitisme culturel européen. Né à Monte-Carlo en 1878 d’un père hongrois et d’une aristocrate viennoise, Franz Schreker a vécu dans toutes les capitales européennes. D’abord nommé directeur du Conservatoire de Vienne, il fera, de la Musikhochschule de Berlin dès 1920, un des centres névralgiques de la vie musicale européenne. Décrété "artiste dégénéré" par les nazis - ce qui est un honneur rétrospectivement - il meurt prématurément en 1934 dans un oubli total.

Son œuvre magnifique, évoquant la Mittel Europa des Sigmund Freud, Arthur Schnitzler et autre Hugo von Hoffmannsthal - dont ce "Der Ferne Klang" (un de ses dix opéras) -, est rejouée en Allemagne, en particulier au Festival de Salzbourg. Mais la France traînait les pieds. Cette injustice est réparée grâce à cette nouvelle production du metteur en scène Stéphane Braunschweig, qui a imposé son talent dans maintes maisons d’opéra pour ce répertoire. Ce sera aussi l’opportunité d’écouter le nouveau directeur musical de l’Orchestre philharmonique de Strasbourg, le chef slovène Marko Letonja, familier des lieux - pour des opéras de Wagner dont on se souvient.

Auteur d’un livret frappé au coin d’un naturalisme proche de celui du dramaturge Franz Wedekind (l’héroïne Grete de "Der Ferne Klang" est une lointaine sœur de Lulu), la musique de Franz Schreker est au contraire subtilement tonale, riche en nuances chromatiques, très straussienne pour tout dire. Un vrai plaisir des oreilles pour une histoire tragique centrée sur la condition du créateur moderne, prisonnier de ses mauvais choix existentiels et artistiques dans une société corrompue. Ce "son lointain" est la métaphore de la quête du compositeur Fritz, qui paiera de ne l’avoir pas reconnu, au plus près.

© Alain Kaiser.
Première le 19 octobre 2012 à 20 h.
21 octobre à 15 h, 27 octobre 20 h, 30 octobre 20 h.

"Der Ferne Klang" ("Le Son lointain")
Opéra en trois actes de Franz Schreker (1878 – 1934).
Livret du compositeur.
Opéra national du Rhin, Strasbourg (67), 0825 84 14 84.
>> operanationaldurhin.eu

Le 9 novembre 2012 à 20h et 11 novembre 15 h.
La Filature, Grande salle, Mulhouse (68), 03 89 36 28 28.
>> lafilature.org

Scénographie et mise en scène : Stéphane Braunschweig.
Collaboration à la scénographie : Alexandre de Dardel.
Lumières : Marion Hewlett.
Costumes : Thibault Vancraenenbroeck.

Distribution :
Helena Juntunen, soprano : Grete Graumann.
Will Hartmann, ténor : Fritz.
Stanislas de Barbeyrac, ténor : Le chevalier, Un individu suspect.
Martin Snell, basse : Graumann, 2e choriste.
Teresa Erbe, mezzo-soprano : Mme Graumann, La serveuse.
Stephen Owen, baryton-basse : Dr Vigelius, Le baron.

Chœurs de l’Orchestre national du Rhin.
Michel Capperon, chef de chœur.
Orchestre philharmonique de Strasbourg.
Marko Letonja, direction.

Christine Ducq
Vendredi 19 Octobre 2012
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