Théâtre

Comment ai-je pu entrer là-dedans ? (Enfants à partir de 7 ans)

En ce moment, au Théâtre National de Chaillot, "Comment ai-je pu tenir là-dedans ?", d’après la Chèvre de Monsieur Seguin, d’Alphonse Daudet. Un spectacle qui étonne les petits autant qu’il déroute les grands.



Avec Jean-Lambert Wild et Stéphane Blanquet (illustrateur et plasticien) à la scénographie, le Théâtre National de Chaillot prend des allures de scène expérimentale. Entre musique électronique et tonalités psychédéliques, le spectateur se retrouve transbahuté dans un univers aux allures étranges. Toutefois, très difficile de parler d’un spectacle pour lequel nous n’avons absolument pas été touchés...

Bien entendu, nous sommes en mesure d’apprécier l’angle sous lequel est vue l’histoire célèbre (à peine remaniée) de Daudet. De la lumière aux accessoires, on se croirait avoir pénétré dans la tête de la petite chèvre, que l’on suit pas à pas jusqu’à sa rencontre avec le loup. S’ouvre alors une dimension psychanalytique qu’on ne perçoit pas forcément à la première lecture : au-delà du désir de liberté de la petite chèvre, il y a aussi l’envie beaucoup (plus prégnante) de la transgression. On sait à quel point le danger a toujours constitué une part bien excitante.

Bien entendu, nous sommes aussi en mesure d’apprécier les énormes qualités scénographiques de Jean-Lambert Wild et Stéphane Blanquet, surtout lorsqu’on arrive à une telle maîtrise de son art. Il suffit de regarder les photos pour se rendre compte qu’il s’agit d'une œuvre, celle de véritables plasticiens. Quatre mêmes décors aux couleurs changeantes tournent en rond. Aussi, le mobilier est le même mais ne se ressemble pas. L’atmosphère se transforme au gré de la petite chèvre et de ses humeurs vagabondes. Elle tourne en rond dans son enclos trop petit, comme nous-mêmes tournerions si nous retrouvions coincés dans la tête du personnage. L'analyse est fine.

Bien entendu encore, on ne peut que saluer le travail remarquable de la danseuse et (entre autre) comédienne Silke Mansholt. Son corps hoquette avec grâce. Et ses soliloques (André Wilms, le narrateur) s’imposent comme une véritable présence scénique supplémentaire. Aussi, on se laisse sans difficulté transporter dans les réflexions de la chevrette.

Cependant, le phénomène de répétition permanente dans lequel s’inscrit la mise en scène (comme le conte, d'ailleurs) trouve (à notre sens) son ancrage dans un intérêt beaucoup plus psychanalytique qu’esthétique. En pénétrant (dans ?) les pensées de la petite blanquette, la scène se fait l’écho d’interrogations sans fin. La gestuelle est impeccable, le cadrage parfait, mais tellement parfait qu’ensemble ils oublient de nous bouleverser. Nous voulons bien croire que notre sensibilité n’a pas rejoint celle de l’artiste. Toutefois, est-il encore question de sensibilité lorsqu'il s'agit d'un théâtre à la limite du conceptuel ?

Les enfants qui, eux, n’intellectualisent que rarement sont dans ce cas un bon thermomètre… Attention, ce sont des spectateurs intraitables !
(Tous les témoignages ont été recueillis avec l’autorisation des parents, y compris celui de l'adulte... ! Voir plus bas).

Comment ai-je pu tenir là-dedans ?

(Vu le 30 avril 2011)

D’après La Chèvre de Monsieur Seguin, d’Alphonse Daudet.
Une fable de Stéphane Blanquet et Jean Lambert-wild.
Direction : Jean Lambert-wild.
Musique : Jean-Luc Therminarias, Léopold Frey.
Scénographie : Stéphane Blanquet, Jean Lambert-wild.
Assistant à la scénographie : Thierry Varenne.
Lumières : Renaud Lagier.
Son : Christophe Farion.
Costumes et accessoires : Olive.
Décor et costumes réalisés par les ateliers de la Comédie de Caen.
Avec : Silke Mansholt, la petite chèvre et André Wilms, le narrateur.
Production Comédie de Caen CDN de Normandie.
À partir de 7 ans.

Du 26 avril au 4 mai 2011 à 20 h 30.
Samedi 30 avril à 16 h 30 et 20 h 30.
Relâche dimanche et lundi.
Représentations scolaires :
27, 28 avril et 4 mai 14 h 30, 3 mai 10 h et 14 h 30.
Renseignements : 01 53 65 30 00
www.theatre-chaillot.fr

Tournée :
12 et 13 mai 2011 : Théâtre de Chelles (77).
17 au 20 mai 2011 : Théâtre de L'Onde, Vélizy-Villacoublay (78).
Juillet : Théâtre National de Séoul, Corée du Sud.
Août : Performing Arts Center de Shizuoka et Performing Arts Center de Kitakyushu, Japon.
Novembre 2011 :
Scène Nationale de Belfort.
Scène Nationale de Quentin en Yvelines.
Scène Nationale du Petit Quevilly.
Décembre 2011 :
Maison de la musique de Nanterre.
Le Trident, Scène Nationale de Cherbourg.
À suivre...

Sheila Louinet
Lundi 2 Mai 2011
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