Théâtre

"Adolf Cohen"... un plaisir extrême nourri d'intense humanité !

"Adolf Cohen", Comédie Bastille, Paris

Jean-Loup Horwitz, dans une pièce d'une grande intensité, ayant une résonance politique aujourd’hui particulièrement importante, montre une figure ouverte de la tolérance en la personne d’Adolf Cohen.



© Jacques Combe.
Il y a des pièces où c’est un réel plaisir d’être dans la salle. Adolf Cohen en est une car celle-ci a un positionnement politique qui botte le Q (et je ne parle pas de la touche de mon clavier) à tous les extrémismes, politiques et religieux.

Adolf Cohen (Jean-Loup Horwitz)… un oxymore patronymique où Adolf a été choisi par la maman (Isabelle de Botton) car original avant que le prénom ne devienne tragiquement connu. Puis, Adolf est devenu difficile à porter, sauf à vouloir être copains comme cochons avec des fachos. Accoler Adolf à Cohen peut être perçu comme cocasse ou (très) provocateur avec le risque de se mettre à dos la communauté juive et finir bras dessus de saoul avec des fachos (les mêmes que précédemment plus quelques affidés). Il y a mieux pour finir ses soirées.

Adolf Cohen vit des situations qui l’amène, enfant, à vivre, pour fuir le nazisme, avec une femme n’aimant pas les Juifs, elle qui ignore l’appartenance religieuse du petit. Pour se fondre, il doit manger du porc (qu’il adore), embrasser la religion chrétienne (par amour) et devient diacre (par volonté).

© Jacques Combe.
Juste après la Seconde Guerre mondiale, Adolf Cohen vit en Palestine aux côtés d’Arabes en prenant conscience que les Palestiniens sont dépossédés de leur terre et qu’il faut qu’il y ait deux États voisins, Israël et Palestine. À aucun moment, Adolf Cohen ne se départit d’une ouverture d’esprit et de tolérance. Il devient député à la Knesset pour défendre ces idées de communion entre Juifs et Arabes. Jusqu’au jour où l’intégrisme…

Ce qui fait le personnage est le bois qui le caractérise, solide et fort, et non pas la feuille qu’il aurait pu être, influencé, happé par tous ces conflits pour se replier sur lui-même. Non… il prend du recul, il ne fait pas d’un moment particulier, une généralité, d’un événement, une position tranchée, d’une guerre une conviction. Il ne se nourrit d’aucune idéologie. Il avance vers son voisin, cet Autre, pour le découvrir, le connaître et en faire son compagnon.

La fin est tragique avec une question posée… Dieu est plus grand*, cri détourné et devenu de guerre chez les intégristes, ces amis du diable. Oui mais… Plus grand que quoi ?

C’est beau, chouette, bien écrit et très bien joué.

*En arabe, Allahou akbar, expression consacrée, entre autres, lors d’appels à la prière ou d’événements importants.

"Adolf Cohen"

© Jacques Combe.
Texte : Jean-Loup Horwitz.
Mise en scène : Nicole et Jacques Rosner.
Avec Isabelle de Botton, Jean-Loup Horwitz.
Musique : Professeur Inlassable.
Costumes : Chouchane Abello.
Lumières : Stéphane Baquet.
Durée : 1 h 30.

Jusqu'au 2 janvier 2016.
Du jeudi au samedi à 19 h, dimanche à 15 h.
Comédie Bastille, Paris 11e, 01 48 07 52 07.
>> comedie-bastille.com

Safidin Alouache
Vendredi 23 Octobre 2015
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