Trib'Une

"À dix-huit ans, j'ai quitté ma Province…"

La chronique d'Isa-belle L

Avez-vous remarqué que s'affichaient depuis quelques semaines dans le tout Paris une magnifique paire d'yeux bleus ? Vous êtes-vous arrêtés quelques secondes (on peut toujours rêver !) face à Morris ?



© DR.
De Bastille à Châtelet, en passant par Strasbourg-Saint-Denis ? Morris, vous savez, c'est lui (Gabriel de son prénom) qui a donné son nom aux colonnes dans la capitale ? Ces colonnes qui donnent encore l'envie d'aller voir des artistes dans les salles…

Êtes-vous tombés, nez à nez, face à elle ? Alexandra Roth ? Jeune et sublime plante de vingt-cinq ans qui, placardée sur quelques mètres carrés, illumine à nouveau ce Paris, rattrapé un temps par un vent de folie.

Suivez le guide. Je l'ai regardée moi. Je l'ai fixée et j'ai pensé : "ce qu'elle est jolie", puis j'ai approché mon regard, plus près d'elle encore, parlant seule dans mon quartier : "Tiens ! Et si j'y allais ?"

J'ai bien fait. Elle est unique. Pourtant, ce soir-là ! Ce qu'il faisait froid bordel ! Mais j'ai réussi à atteindre sans dommage, la salle du Gymnase : Marie Bell.

Quand elle a déboulé sur scène, j'ai d'abord regardé ses chaussures. En plus d'avoir des yeux bleus sublimes, elle porte une paire de talons dont la marque m'a échappé mais qui rendrait jalouse la plus naine de toutes nos chanteuses de variétés. Et elle, elle n'est jamais tombée.

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Alexandra Roth a ce qu'on appelle du tempérament. Dans la vie, on le comprend très vite. Elle nous la raconte un peu. Sa vie. De la naissance à l'adolescence, des cours de récrée au cours de danse, des visites médicales (excellents ces passages) aux goûters ; puis elle grandit. On la suit de Nice à Paris, des visites d'appartement aux terrasses des cafés. Des recherches pour nanas célibataires aux émissions de TV pourries. (Le sketch "Belle toute nue" est une réussite) Elle nous parle d'elle, de ses origines, avec délice et regard vif.

Alexandra Roth est une actrice, une danseuse, une chanteuse. Quand elle pousse la voix, plus aucun bruit dans la salle. Elle est étonnante. "Donnez-moi Zaz à la place, je n'en veux pas". Ah ! Le producteur d'Alexandra est aussi celui de Zaz et question "vocalises", je vote Alexandra ! Mais je tiens à féliciter cet homme aussi - Dominique Coubes -, dénicher des talents, c'est une chose mais y croire chaque soir, c'en est une autre. Et pour Alexandra, on ne peut que le remercier de la faire ainsi exister.

Alexandra est comme elle est. Naturelle, pétillante, craquante dans sa combinaison noire. Ses formes sont présentes et elle ne s'en cache pas. Elle aurait pu chanter aussi "Je suis comme ça… papalalapapapa"… Elle est comme elle est et puis, merde quoi ! C'est Patti Smith qui, un jour, a écrit ça.

Je lui ai envié ses pompes. Je n'ai pas eu le temps de lui poser la question mais de toute façon, je lui laisse l'exclusivité. Je ne lui demanderais pas où elle les a achetées. À moins que je ne revienne au théâtre du Gymnase. Un soir, comme ça, en plein hiver. Quand le vent nous a saisi les joues, que les yeux piquent et notre nez a rougi. Qu'on ne demande qu'à se réchauffer, ce spectacle-là, sur les Grands boulevards, c'est une excellente idée.

"Morris" ne s'est pas trompé en affichant ce visage. Le regard d'Alexandra Roth est placardé dans la ville des lumières et, ce qui apparaît spontanément, ce sont ses yeux. D'un bleu… et si vous vous approchez encore un peu, suivez-là ! Vous ne le regretterez pas. Elle est drôle, c'est une "sacrée" bout de femme, et elle n'a rien à cacher puisque chez elle, tout est assumé. Ce que c'est bon de passer l'hiver avec une comédienne hors pair qui, du haut de ses talons, nous emporte dans son univers, comme une gourmandise ou mieux : un excellent dessert.

Alexandra Roth. Seule en scène. Un vent d'air frais a soufflé dans cette salle. Qui ne pique pas les yeux mais les fait pleurer. De rire. Pendant près d'une heure et demie. Puis, c'est la fin, on applaudit. Fort. On danserait bien avec elle. Plus encore, on rirait des heures en sa compagnie. Il y a quelque chose que je voudrais lui glisser à l'oreille, je le ferais devant la colonne si je viens à repasser devant.

Et voilà ce que je dirai à "Morris" à l'abri des regards indiscrets : "Alexandra, tu as très bien fait de quitter Nice".

Alexandra Roth

De et par Alexandra Roth.
Mise en scène : Dominique Coubes.
Durée : 1 h 10.

Depuis le 22 janvier 2015.
Du jeudi au samedi à 20 h.
Théâtre du Gymnase, Studio Marie Bell, Paris 10e, 01 42 46 79 79.
>> theatredugymnase.com

Isabelle Lauriou
Jeudi 12 Février 2015
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