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Mouvement national pour l'intermittence... du côté de Marseille  20/06/2014

Lettre ouverte à Monsieur le Président de la République ; Monsieur le Premier Ministre ; Monsieur le Ministre du Travail, de l’Emploi et du Dialogue Social ; Madame la Ministre de la Culture et de la Communication,

Nous sommes directeurs de structures, de lieux et de festivals, à Marseille.

Nous vous demandons instamment de ne pas agréer l’accord Unedic du 22 mars dernier et de rouvrir des négociations sur la base des propositions du comité de suivi qui, en accord avec les coordinations des intermittents, a fait des propositions pertinentes, justes, adaptées et plus économiques pour la renégociation des annexes 8 et 10 dans le cadre des négociations sur l’assurance chômage.

Nous ne reviendrons pas sur l’analyse de l’accord du 22 mars, dont nombre de décryptages et de lettres ouvertes vous ont fait état : cet accord est unanimement jugé injuste, inefficace et destructeur. Nous attirons votre attention sur le fait que cinq festivals sont à l’affiche à Marseille en ce mois de juin.

Cinq festivals =
- 137 films, 250 séances de cinéma,
- 90 compagnies de danse-théâtre et groupes de musique en spectacles et concerts,
- 7 expositions d’art contemporain,
- plus de 900 artistes professionnels,
- auxquels il faut rajouter les actions de sensibilisation : ateliers de pratique amateur, stages professionnels, conférences...
qui génèrent des centaines d’emplois permanents et intermittents, ainsi que saisonniers dans le secteur du tourisme.

Un premier spectacle a été annulé dans notre ville le 13 juin dernier. Le lendemain, le festival Uzès Danse a été totalement annulé.

Les menaces de grève s’intensifient de jour en jour : avec elles, le risque des annulations.

Votre fin de non recevoir engagerait votre entière responsabilité dans ces annulations dont les collectivités territoriales ne pourront assumer les conséquences financières.

Comment dès lors, expliquerez-vous à la population marseillaise que ces temps forts du mois de juin, attendus et reconnus depuis plus de 20 ans, n’aient pas lieu ? Comment en rendrez-vous compte à cette population, qui, malgré ses grandes difficultés économiques et sociales, s’est massivement mobilisée aux côtés des artistes et des acteurs culturels, à nos côtés donc, pour réussir Marseille-Provence Capitale Européenne de la Culture 2013 ?

A son tissu associatif, aux enfants de ses écoles, à ses pratiquants amateurs et ses publics de plus en plus nombreux, jusque et y compris dans les quartiers qualifiés des plus "sensibles", comment expliquerez-vous que cette énergie, ce potentiel, cette curiosité, cette dynamique, cette fierté de s’être retrouvé acteur
à part entière d’une histoire collective dont l’art et la culture furent le centre nerveux, soient anéantis six mois seulement après la fin de l’année capitale ?

Car, sachez-le, malgré la désinformation télévisuelle, voire la manipulation éhontée des chiffres, une majorité de nos concitoyens a bien compris - ce fut une des vertus de MP2013 - que le mouvement des intermittents n’est en rien une simple défense corporatiste : il s’agit bien de défendre un projet de société dans laquelle l’art et la culture sont vecteurs d’émancipation et de lien social en même temps que vecteurs de développement économique.

Nous espérons une réponse à la hauteur des enjeux sociétaux en cours, nous espérons vivement que vous renonciez à agréer cet accord.

Anne GUIOT
directrice de Karwan

Premiers signataires :
Alain Arnaudet, directeur de La Friche la Belle de Mai ;
Hubert Colas et Jean-Marc Montera, directeurs de Montévidéo ;
Alain Fourneau, directeur du Théâtre des Bernardines ;
Régis Guerbois, président du Festival de Jazz des Cinq Continents ;
Pierrette Monticelli et Haïm Menahem, directeurs du Théâtre Joliette-Minoterie ;
Josette Pisani, directrice de marseille objectif DansE ;
Apolline Quintrand, directrice du Festival de Marseille_danse et arts multiples ;
Jean-Pierre Rehm, directeur du FIDMarseille / Festival International de Cinéma ;
Ferdinand Richard, directeur du Festival Mimi ;
Christian Sebille, directeur du gmem-CNCM-marseille, Centre National de Création Musicale ;
Pierre Berthelot, président de la Cité des Arts de la Rue.

Communiqué de Karwan - Bâtisseur de projets culturels territoriaux - Arts de la Rue & Arts du Cirque, La Cité des Arts de la Rue - 225 avenue des Aygalades - 13015 Marseille.
La Rédaction

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"Le Chef-d'œuvre Inconnu" Histoire fascinante transcendée par le théâtre et le génie d'une comédienne

À Paris, près du quai des Grands-Augustins, au début du XVIIe siècle, trois peintres devisent sur leur art. L'un est un jeune inconnu promis à la gloire : Nicolas Poussin. Le deuxième, Franz Porbus, portraitiste du roi Henri IV, est dans la plénitude de son talent et au faîte de sa renommée. Le troisième, le vieux Maître Frenhofer, personnage imaginé par Balzac, a côtoyé les plus grands maîtres et assimilé leurs leçons. Il met la dernière main dans le plus grand secret à un mystérieux "chef-d'œuvre".

© Jean-François Delon.
Il faudra que Gilette, la compagne de Poussin, en qui Frenhofer espère trouver le modèle idéal, soit admise dans l'atelier du peintre, pour que Porbus et Poussin découvrent le tableau dont Frenhofer gardait jalousement le secret et sur lequel il travaille depuis 10 ans. Cette découverte les plongera dans la stupéfaction !

Quelle autre salle de spectacle aurait pu accueillir avec autant de justesse cette adaptation théâtrale de la célèbre nouvelle de Balzac ? Une petite salle grande comme un mouchoir de poche, chaleureuse et hospitalière malgré ses murs tout en pierres, bien connue des férus(es) de théâtre et nichée au cœur du Marais ?

Cela dit, personne ne nous avait dit qu'à l'Essaïon, on pouvait aussi assister à des séances de cinéma ! Car c'est pratiquement à cela que nous avons assisté lors de la générale de presse lundi 27 mars dernier tant le talent de Catherine Aymerie, la comédienne seule en scène, nous a emportés(es) et transportés(es) dans l'univers de Balzac. La force des images transmises par son jeu hors du commun nous a fait vire une heure d'une brillante intensité visuelle.

Pour peu que l'on foule de temps en temps les planches des théâtres en tant que comédiens(nes) amateurs(es), on saura doublement jauger à quel point jouer est un métier hors du commun !
C'est une grande leçon de théâtre que nous propose là la Compagnie de la Rencontre, et surtout Catherine Aymerie. Une très grande leçon !

Brigitte Corrigou
06/03/2024
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"L'Effet Papillon" Se laisser emporter au fil d'un simple vol de papillon pour une fascinante expérience

Vous pensez que vos choix sont libres ? Que vos pensées sont bien gardées dans votre esprit ? Que vous êtes éventuellement imprévisibles ? Et si ce n'était pas le cas ? Et si tout partait de vous… Ouvrez bien grands les yeux et vivez pleinement l'expérience de l'Effet Papillon !

© Pics.
Vous avez certainement entendu parler de "l'effet papillon", expression inventée par le mathématicien-météorologue Edward Lorenz, inventeur de la théorie du chaos, à partir d'un phénomène découvert en 1961. Ce phénomène insinue qu'il suffit de modifier de façon infime un paramètre dans un modèle météo pour que celui-ci s'amplifie progressivement et provoque, à long terme, des changements colossaux.

Par extension, l'expression sous-entend que les moindres petits événements peuvent déterminer des phénomènes qui paraissent imprévisibles et incontrôlables ou qu'une infime modification des conditions initiales peut engendrer rapidement des effets importants. Ainsi, les battements d'ailes d'un papillon au Brésil peuvent engendrer une tornade au Mexique ou au Texas !

C'est à partir de cette théorie que le mentaliste Taha Mansour nous invite à nouveau, en cette rentrée, à effectuer un voyage hors du commun. Son spectacle a reçu un succès notoire au Sham's Théâtre lors du Festival d'Avignon cet été dernier.

Impossible que quiconque sorte "indemne" de cette phénoménale prestation, ni que nos certitudes sur "le monde comme il va", et surtout sur nous-mêmes, ne soient bousculées, chamboulées, contrariées.

"Le mystérieux est le plus beau sentiment que l'on peut ressentir", Albert Einstein. Et si le plus beau spectacle de mentalisme du moment, en cette rentrée parisienne, c'était celui-là ? Car Tahar Mansour y est fascinant à plusieurs niveaux, lui qui voulait devenir ingénieur, pour qui "Centrale" n'a aucun secret, mais qui, pourtant, a toujours eu une âme d'artiste bien ancrée au fond de lui. Le secret de ce spectacle exceptionnel et époustouflant serait-il là, niché au cœur du rationnel et de la poésie ?

Brigitte Corrigou
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"Deux mains, la liberté" Un huis clos intense qui nous plonge aux sources du mal

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© Christel Billault.
Ordonné, pratique, méthodique, il organise l'extermination des marginaux et des Juifs comme un gestionnaire. Point. Il aurait été, comme son sous-fifre Adolf Eichmann, le type même décrit par Hannah Arendt comme étant la "banalité du mal". Mais Himmler échappa à son procès en se donnant la mort. Parfois, rien n'est plus monstrueux que la banalité, l'ordre, la médiocrité.

Malgré la pâleur de leur personnalité, les noms de ces âmes de fonctionnaires sont gravés dans notre mémoire collective comme l'incarnation du Mal et de l'inimaginable, quand d'autres noms - dont les actes furent éblouissants d'humanité - restent dans l'ombre. Parmi eux, Oskar Schindler et sa liste ont été sauvés de l'oubli grâce au film de Steven Spielberg, mais également par la distinction qui lui a été faite d'être reconnu "Juste parmi les nations". D'autres n'ont eu aucune de ces deux chances. Ainsi, le héros de cette pièce, Félix Kersten, oublié.

Joseph Kessel lui consacra pourtant un livre, "Les Mains du miracle", et, aujourd'hui, Antoine Nouel, l'auteur de la pièce, l'incarne dans la pièce qu'il a également mise en scène. C'est un investissement total que ce comédien a mis dans ce projet pour sortir des nimbes le visage étonnant de ce personnage de l'Histoire qui, par son action, a fait libérer près de 100 000 victimes du régime nazi. Des chiffres qui font tourner la tête, mais il est le résultat d'une volonté patiente qui, durant des années, négocia la vie contre le don.

Bruno Fougniès
15/10/2023