La Revue du Spectacle, le magazine des arts de la scène et du spectacle vivant. Infos théâtre, chanson, café-théâtre, cirque, arts de la rue, agenda, CD, etc.



Augmenter la taille du texte
Diminuer la taille du texte
Partager
Danse

"Répertoire #1"… le Hip-Hop comme vous ne l'avez jamais vu !

Au festival Kalypso, rendez-vous est donné aux chorégraphes qui ont marqué le Hip-Hop. Les frontières artistiques de cette danse sont repoussées pour faire du corps un organe où grâce et rythme cohabitent aussi bien avec de la musique classique que des musiques urbaines et contemporaines.



© M. Dina Photographie.
© M. Dina Photographie.
Le festival Kalypso, dans sa troisième édition, nous fait voyager dans le monde du "Street Art" avec pour escales Saint-Denis, Créteil, Paris, Maisons-Alfort, Aubervilliers, Saint-Ouen, Bagneux et Sceaux. Un festival bienvenu qui met un joli coup de projecteur sur le vivier artistique des banlieues, loin de l'image négative colportée par certains médias.

Et nous sommes allés à Créteil dans un lieu ô combien festif et chaleureux appelé "La Maison des Arts" avec, à l'affiche, "Répertoire #1" regroupant les chorégraphies de Kadder Attou, Anthony Egéa, Mourad Merzouki, Marion Motin et Bouba Landrille Tchouda. Que de belles pointures qui marquent depuis plusieurs années la scène hip-hop.

"Terrain vague" (2006) de Merzouki plante une scénographie dans laquelle un jeu de lumières met en relief des caissons métalliques avec l'illusion d'une surface d'eau les recouvrant. Un ensemble de danseurs apparaît dans des mouvements où les pieds deviennent moteurs et lancent les corps en avant comme poussée par une force irrésistible. J'exagère ? À peine !

© Gilles Aguilar 2015.
© Gilles Aguilar 2015.
Suit "Urban ballet" avec le Boléro de Ravel. Surprenant pour le hip-hop ? Que nenni car Anthony Egéa fait du hip-hop un Art au-dessus des codes rythmiques et musicaux. La danse s'accapare le tempo de Ravel pour être déclinée dans une gestuelle où les mouvements sont courbes, faussement cassés, prenant deux rythmes différents, avec l'un à rebrousse-poil car à l'arrêt quand le Boléro déroule un rythme continu de percussions, alors que l'autre enchaîne les figures sur le même rythme que la musique. La danse oscille sur deux niveaux, fixes, courbes et continues ou mouvants, cassés et alternés. Tout se marie comme si classique et hip-hop étaient pile et face d'une même pièce, sel et poivre d'un même plat. C'est superbe !

Nos cinq chorégraphes apportent leur touche artistique faisant du hip-hop une danse aux approches corporelles et musicales très riches. En groupe, en solo, sur la tête, bras aux jambes, repliés sur soi ou élancés avec de petites ou grandes enjambées, une thématique corporelle charrie une vaste gamme de mouvements dans "Douar" (2003, Kader Attou), "Têtes d'affiches" (2012, Bouba Landrille Tchouda), "In the middle" (2014, Marion Motin), "Bliss" (2014, Anthony Egéa), "10 versions" (2001), "Tricôté" (2008) et "Agwa" (2008) (Mourad Merzouki).

© Gilles Aguilar 2015.
© Gilles Aguilar 2015.
Les neuf chorégraphies s'enchaînent dans une très belle scénographie, baignée dans des lumières chaudes. Ce sont des solos ou des duos avec des danseurs sur un banc, faisant des figures au ralenti en arrière-scène dans une pénombre. C'est aussi un ensemble de danseurs qui traversent la scène avec, à tour de rôle, l'un qui décroche du groupe pour faire un solo. Le hip-hop est vu au travers du collectif et de l'individuel, de l'identité de soi à l'identité de groupe au sens noble et ouvert. C'est aussi une explosion de danseurs qui virevoltent, s'élancent et voltigent défiant les lois de la pesanteur.

La danse est parfois théâtralisée et apporte dans certaines chorégraphies un cachet scénographique de très bel acabit. Les mouvements sont acrobatiques, recroquevillés, vifs, rapides ou sensuels, montrant de la "Street Art" son formidable réservoir de possibilités artistiques.

C'est de l'Art dans toute sa diversité avec des chorégraphes qui font du hip-hop un grand "Hop" en avant pour monter les escaliers de la Danse à côté du classique et du contemporain.

"Répertoire #1"

© Gilles Aguilar 2015.
© Gilles Aguilar 2015.
Création 2014 pour 30 danseurs.
Direction artistique : Mourad Merzouki.
Assistant chorégraphique : Kader Belmoktar.
Chorégraphies : Kader Attou, Anthony Egéa, Mourad Merzouki, Marion Motin, Bouba Landrille Tchouda
.
Avec : Rémi Autechaud, Kader Belmoktar, Ilyess Benali, Sofiane Benkamla, David Bernardo, Constance Besançon, Marion Blanchot, Antoine Bouiges, Anaïs Couquet, Aurélien Desobry, Karim Felouki, Mickaël Florestan, Christophe Gellon, Jean-Sébastien Godefroy Martin, Manuel Guillaud, Rachid Hamchaoui, Eve Hanus, Sofiane Kinzi, Yani Kinzi, Jérôme Luca, Soraya Mohamed, Julie Moreau, Marion Motin, Cécilia N'Guyen, Alexandra Payrou, Vanessa Petit, Emilie Sudre, Maxime Thach, Aurélien Vaudey, Clarisse Veaux.
Lumières : Cécile Robin assistée de Yoann Tivoli.
Scénographie : Benjamin Lebreton.
Costumes : Nadine Chabannier.
Régie Lumières : Amélie Verjat.
Régie Son : Cyril Virevaire.
Régie Plateau : Judith Leray ou Axel Psaltopoulos.
Durée : 1 h.

Du 5 novembre au 20 décembre 2015.
Lieux des différentes représentations du festival Kalypso :
5 novembre au 20 décembre : Académie Fratellini, Saint-Denis (93).
17 au 21 novembre : Maison des Art, Créteil (94).
18 et 19 novembre : La Villette, Paris (19e).
22 novembre : Théâtre Debussy, Maison Alfort (94).
22 novembre : Théâtre Louis Aragon , Tremblay en France (93).
24 au 29 novembre : Maison des Métallos , Paris (11e).
26 novembre : Espace Renaudie, Aubervilliers (93).
26 et 27 novembre : Espace 1789 , Saint Ouen (93).
28 novembre : Maison de la musique et de la danse , Bagneux (92).
29 novembre au 5 décembre : Les Gémeaux , Sceaux (92).

Réservation : 01 72 59 40 30.
>> academie-fratellini.com
>> ccncreteil.com/kalypso
© M. Dina Photographie.
© M. Dina Photographie.

Safidin Alouache
Jeudi 3 Décembre 2015

Théâtre | Danse | Concerts & Lyrique | À l'affiche | À l'affiche bis | Cirque & Rue | Humour | Festivals | Pitchouns | Paroles & Musique | Avignon 2017 | Avignon 2018 | Avignon 2019 | CédéDévédé | Trib'Une | RV du Jour | Pièce du boucher | Coulisses & Cie | Coin de l’œil | Archives | Avignon 2021 | Avignon 2022 | Avignon 2023 | Avignon 2024 | À l'affiche ter











À découvrir

"Rimbaud Cavalcades !" Voyage cycliste au cœur du poétique pays d'Arthur

"Je m'en allais, les poings dans mes poches crevées…", Arthur Rimbaud.
Quel plaisir de boucler une année 2022 en voyageant au XIXe siècle ! Après Albert Einstein, je me retrouve face à Arthur Rimbaud. Qu'il était beau ! Le comédien qui lui colle à la peau s'appelle Romain Puyuelo et le moins que je puisse écrire, c'est qu'il a réchauffé corps et cœur au théâtre de l'Essaïon pour mon plus grand bonheur !

© François Vila.
Rimbaud ! Je me souviens encore de ses poèmes, en particulier "Ma bohème" dont l'intro est citée plus haut, que nous apprenions à l'école et que j'avais déclamé en chantant (et tirant sur mon pull) devant la classe et le maître d'école.

Beauté ! Comment imaginer qu'un jeune homme de 17 ans à peine puisse écrire de si sublimes poèmes ? Relire Rimbaud, se plonger dans sa bio et venir découvrir ce seul en scène. Voilà qui fera un très beau de cadeau de Noël !

C'est de saison et ça se passe donc à l'Essaïon. Le comédien prend corps et nous invite au voyage pendant plus d'une heure. "Il s'en va, seul, les poings sur son guidon à défaut de ne pas avoir de cheval …". Et il raconte l'histoire d'un homme "brûlé" par un métier qui ne le passionne plus et qui, soudain, décide de tout quitter. Appart, boulot, pour suivre les traces de ce poète incroyablement doué que fut Arthur Rimbaud.

Isabelle Lauriou
25/03/2024
Spectacle à la Une

"Mon Petit Grand Frère" Récit salvateur d'un enfant traumatisé au bénéfice du devenir apaisé de l'adulte qu'il est devenu

Comment dire l'indicible, comment formuler les vagues souvenirs, les incertaines sensations qui furent captés, partiellement mémorisés à la petite enfance. Accoucher de cette résurgence voilée, diffuse, d'un drame familial ayant eu lieu à l'âge de deux ans est le parcours théâtral, étonnamment réussie, que nous offre Miguel-Ange Sarmiento avec "Mon petit grand frère". Ce qui aurait pu paraître une psychanalyse impudique devient alors une parole salvatrice porteuse d'un écho libératoire pour nos propres histoires douloureuses.

© Ève Pinel.
9 mars 1971, un petit bonhomme, dans les premiers pas de sa vie, goûte aux derniers instants du ravissement juvénile de voir sa maman souriante, heureuse. Mais, dans peu de temps, la fenêtre du bonheur va se refermer. Le drame n'est pas loin et le bonheur fait ses valises. À ce moment-là, personne ne le sait encore, mais les affres du destin se sont mis en marche, et plus rien ne sera comme avant.

En préambule du malheur à venir, le texte, traversant en permanence le pont entre narration réaliste et phrasé poétique, nous conduit à la découverte du quotidien plein de joie et de tendresse du pitchoun qu'est Miguel-Ange. Jeux d'enfants faits de marelle, de dinette, de billes, et de couchers sur la musique de Nounours et de "bonne nuit les petits". L'enfant est affectueux. "Je suis un garçon raisonnable. Je fais attention à ma maman. Je suis un bon garçon." Le bonheur est simple, mais joyeux et empli de tendresse.

Puis, entre dans la narration la disparition du grand frère de trois ans son aîné. La mort n'ayant, on le sait, aucune morale et aucun scrupule à commettre ses actes, antinaturelles lorsqu'il s'agit d'ôter la vie à un bambin. L'accident est acté et deux gamins dans le bassin sont décédés, ceux-ci n'ayant pu être ramenés à la vie. Là, se révèle l'avant et l'après. Le bonheur s'est enfui et rien ne sera plus comme avant.

Gil Chauveau
05/04/2024
Spectacle à la Une

"Un prince"… Seul en scène riche et pluriel !

Dans une mise en scène de Marie-Christine Orry et un texte d'Émilie Frèche, Sami Bouajila incarne, dans un monologue, avec superbe et talent, un personnage dont on ignore à peu près tout, dans un prisme qui brasse différents espaces-temps.

© Olivier Werner.
Lumière sur un monticule qui recouvre en grande partie le plateau, puis le protagoniste du spectacle apparaît fébrilement, titubant un peu et en dépliant maladroitement, à dessein, son petit tabouret de camping. Le corps est chancelant, presque fragile, puis sa voix se fait entendre pour commencer un monologue qui a autant des allures de récit que de narration.

Dans ce monologue dans lequel alternent passé et présent, souvenirs et réalité, Sami Bouajila déploie une gamme d'émotions très étendue allant d'une voix tâtonnante, hésitante pour ensuite se retrouver dans un beau costume, dans une autre scène, sous un autre éclairage, le buste droit, les jambes bien plantées au sol, avec un volume sonore fort et bien dosé. La voix et le corps sont les deux piliers qui donnent tout le volume théâtral au caractère. L'évidence même pour tout comédien, sauf qu'avec Sami Bouajila, cette évidence est poussée à la perfection.

Toute la puissance créative du comédien déborde de sincérité et de vérité avec ces deux éléments. Nul besoin d'une couronne ou d'un crucifix pour interpréter un roi ou Jésus, il nous le montre en utilisant un large spectre vocal et corporel pour incarner son propre personnage. Son rapport à l'espace est dans un périmètre de jeu réduit sur toute la longueur de l'avant-scène.

Safidin Alouache
12/03/2024